Universal Soldier par 0eil
Quand on est belge, on est avant tout un homme du monde. On est un homme concerné par la souffrance mondiale, où qu'elle se trouve. C'est pourquoi Luc Deveraux, faussement né en Louisiane mais en réalité moule-frite de coeur, se retrouve au Viet-Nam, à parler à des gens qui suent beaucoup et crient énormément. Luc, c'est un homme qui veut changer le monde, mais se retrouve les bras ballant quand, dans le village d'intérieur viet-cong s'avère être estampillé bavure de l'armée par Dolph Lungren, Sergent un peu borderline, qui porte des colliers d'oreilles et hurle un peu plus fort que les autres. Il n'en faut pas plus à Luc pour réclamer sa vie et les deux bougres de s'entre-tuer. Pour être ressuscité des années plus tard sous la forme d'Universal Soldier, des soldats génétiquement modifiés qui font des bruits de robocops grippés, privés de leur mémoire - enfin, pour un temps. En effet, GR44 se souvient bien vite qu'il s'appelle Luc et son pote blond qu'il est un fou-furieux porté sur la violence et l'usage singulier du couteau. Back to Viet-Nam, motherfucker.
Ah, Universal Soldier. Longtemps je l'ai confondu avec l'autre film, là, avec Kurst Russel en soldat du futur, et qui n'a, apparemment, rien à voir. Longtemps on m'a dit qu'il était à voir, qu'il fallait absolument le mettre sur la liste des incontournables des années 90. Du coup, comme je suis un peu un con, moi, j'ai commencé par la fin, avec Regeneration et Day of Reckoning, où les interventions de Jean-Claude sont réduites à peau de chagrin, suintant la fin d'une époque faite de roundhouse kicks et de sourires niais. Là, c'est visage gris de dépression et mouvements secs, déshumanisés. Pour sûr, ça va bien avec la noirceur de plus en plus rampantes du récit. La découverte du premier opus s'est donc faite avec un esprit sain et innocent, m'attendant déjà au pire tant, de toute façon, Universal Soldier est une franchise qui n'a cessé d'être taclée par les suites.
Et ça commence fort pourtant. Avec ce Viet-Nam de studio, aspergé au tuyau d'arrosage, éclairé avec par les fameux "arbres-projos", espèce végétale très répandue dans les pays en pleine guerre, on est bien dans une bonne grosse série B. La suite du métrage nous donne raison : la scène d'introduction des UniSols montre des êtres humains qui font des bruits de Terminator à chaque mouvement, qui vont prendre d'assaut des terroristes pas très organisés et branchent leurs systèmes de communication sur des radio-cassettes pour cacher à leurs renforts la mort des sentinelles. Groovy. Le fait qu'on glisse à l'affiche Dolph et Jean-Claude semblent être la légitimation d'un certain laxisme dans les moyens et la mise en scène : qu'on ne vienne pas me dire qu'Emmerich s'est grave foulé pour tourner tout ça, on dirait plutôt qu'il se buvait des mojitos à la terrasse de l'hôtel payé par la production pendant que son assistant s'occupait du shoot. Bon, ça donne à tout ça un aspect très téléfilm, mais comme scénario et jeu d'acteur y sont au diapason, difficile de reprocher à tout cette équipe de ne pas trop se fouler.
D'autant que si l'on pensait réellement que le ridicule de Kickboxer était maintenant un passé dont vous n'évoquiez l'existence qu'allongé sur le canapé de votre psy, on s'est quand même bien gourré : niveau humour de bas étage, Universal Soldier appuie là où ça fait mal en vous rappelant que Luc, il a plus du tout de mémoire, que non l'ami, il ne sait plus du tout qu'on ne doit pas se mettre tout nu et demander à des dames de vous tâter de partout, ça ne se fait pas dans les pays civilisés. Et on a la séquence du diner, pour rappeler que Luc a un appétit de Sangoku affamé - et le même niveau de maturité ! Du coup, baston à la fraîche avec l'autochtone pendant que la sémillante journaliste est au téléphone en train de mener l'investigation. Personnellement, j'ai trouvé le film bien plus drôle quand il se prend les pieds dans le tapis : le scientifique qui commande au Soldat Universel de prendre la grenade qu'il a dans la main et de la garder soixante secondes pour s'en débarrasser fissa... et qui se retrouve les doigts coincés dans la pogne du maladroit, par exemple. A noter d'ailleurs le souci du détail : le scientifique meurt dans l'explosion, un autre Universal Soldier est mortellement touché mais le soldat qui tenait la grenade va très bien, le bras n'a même pas été arraché par l'explosion. C'était qu'une grenade, après tout. Lol.
Bon, au-delà des pontifiantes séquences un poil trop sérieuses et de l'humour nudiste de Jean-Claude (qui s'en donne à coeur-joie, mais ça fait tellement plaisir de le voir s'amuser encore que je lui pardonne réellement son engouement tout naïf pour son rôle), il y a Dolph. Dolph Lundgren. J'avais déjà souligné dans les précédentes critiques concernant les suites que j'adorais sa prestation en Andrew Scott... ben là, la même. Si y'a bien un truc à clairement sauver, sans second degré ni arrière-pensée, c'est bien l'interprétation de Dolph Lundgren, qui est encore une fois excellent dans son rôle de soldat fou-furieux, qui a le regard inquiétant qu'il faut, le sourire avec ce qu'il faut de perversité et d'amusement purement enfantin. Entre tous ces muscles, ce mec est réellement un bon acteur et soudain, l'horrible vérité m'apparaît : il a malgré tout une vraie filmo de merde et c'est un tort tout à fait regrettable. En tout cas, quelque soit le métrage, Andrew Scott reste LE personnage qui me fait apprécier la franchise. Putain de Dolph Lundgren, il aurait fait un Batou du tonnerre de Dieu, l'enfoiré.
Résultat : un divertissement plutôt amusant, pas très prise de tête, avec aucun intérêt pour son idée de base (des hommes ressuscités et devenus des esclaves humains génétiquement modifiés, quand même !), mais bien plus sur la prétendue amnésie de Jean-Claude, qui s'amuse fiévreusement à jouer les invincibles idiots. C'est dingue en fait, parce qu'au-delà de l'aspect série B évoqué plus haut, on sent quand même que la franchise s'est bâtie essentiellement sur l'amusement de l'équipe qui l'a produit, chose qui, il me semble, s'est bien perdu par la suite. Profitez donc de l'opus initiale en ignorant les séquelles (hormis, peut-être, "Jour du Jugement") et amusez-vous : les années 90 sont finies.