La bande-annonce laissait présager un film casse-gueule, trop ambitieux ou pas assez, et puis en le visionnant on se rend compte qu'on a plutôt vu juste. Le scénario, posé dès l'entrée est simple, convenu, avec juste une dose de mystère qui nous donne envie de continuer, mais on comprend assez vite qu'il ne va pas forcément devoir chercher par-là.
Et en effet, la chose qui crève tout de suite l'écran ce sont ces deux monstres du cinéma français, aussi grandioses l'un que l'autre, et qui proposent leur interprétation sans avoir à forcer, simples, précis, dans un accord majeur absolument parfait. Même physiquement, la symbiose opère, ce ventre énorme qui bouillonne, qu'on laisse forcément se transfigurer involontairement dans les steppes de Russie au côté de Vladimir Poutine, mirage aussitôt éclipsé par la performance électrique de Gérard Depardieu sous ce soleil de plomb, et la silhouette frêle, élégante et glaciale d'une Isabelle Huppert impeccable comme à son habitude. Il serait bien pénible de déterminer qui donne la réplique à l'autre, et c'est dans ce jeu d'acteurs de haut vol que vient bientôt se loger le film.
On comprend mieux l'affiche, où en dix fois plus gros que n'importe qui leurs noms s'étalent, et ce qu'on avait prit pour une annonce commerciale bien compréhensible se révèle être en fin de compte d'une honnêteté qu'il faut reconnaitre, et ce sans ironie.
Ces deux êtres accomplis et brisés, cabossés par la vie, mais qui gardent la dignité de faire comme si de rien n'était dans leurs vies quotidiennes, comme au final nous faisons tous, "s'offrent" presque cette parenthèse dans cette vie de faux-semblants; l'une par nécessité, l'autre certainement par peur d'avoir mauvaise conscience...
On se laisse donc porter par une escroquerie qui fonctionne, un film Nouvelle Vague qui arrive sur le tard, mais qui n'est au final on le sait bien qu'un hymne à l'amour, tout en pudeur, du cinéaste pour ces deux acteurs.
Les éléments fantastiques du scénario donne une teinte étrangement pastel à cette Vallée de la Mort, écrasée par le soleil et la vulgarité de son exploitation touristique, au milieu de laquelle les deux protagonistes-acteurs (on ne s'en défait pas) tentent avec fragilité d'y trouver du réconfort. Très vite, on est comme Gérard Depardieu, on a du mal avec ce scénario, à y croire, comme lui nous n'avons plus d'illusions. Et puis tout comme lui, se trimbalant avec sa dégaine de beauf assumé, ou bien torse nu dans les couloirs de l’hôtel, au final, on en a plus rien à foutre.
On accepte. C'est une performance, et peu importe la réalité des faits, on veut voir leurs jeux respectifs aller au bout d'eux-même, et l'on n'est pas déçu. Un charme certain s'en dégage sans qu'on ne sache vraiment pourquoi, et étrangement ce n'est pas un film raté, porté à bout de bras par deux acteurs extraordinaires, c'est plus que cela.