Le Vampyr de Dreyer, plus qu'un film, est un véritable poème cinématographique. Une atmosphère brumeuse, une ambiance étrange, glauque servie par une photographie trouble: tout le film renvoie quelque chose d'oppressant , à tel point que même le spectateur du 21eme siècle peut se sentir mal à l'aise.
Dés le début dans l'auberge, le ton du film est donné: des événement étranges ont lieu, des ombres sans propriétaires se mouvent sur les murs et un docteur plus menaçant qu'autre chose fait son apparition: vous l'aurez compris, Vampyr est marqué par un aspect totalement surnaturel qui transpire de chaque(rare) réplique, de chaque image.
Si la narration elliptique du film et la caméra sans cesse en mouvement et ne s'attardant sur aucun plan sanctionnent la moindre inattention et peuvent très vite perdre le spectateur, elles ont pour mérite de servir cette ambiance angoissante propre à Vampyr. Quelques scènes sont assez incroyables pour l'époque par leur coté novateur, notamment la séquence de la mort de David Gray, filmée depuis son cercueil (qui offre d'ailleurs une vision en contre-plongée du vampire des plus effrayantes) ou la mort du médecin corrompu, englouti sous la farine blanche (symbole de pureté).
Formellement, vampire est donc une réussite totale, forme qui sert un fond fascinant (comme toujours chez Dreyer): on assiste à une sorte de lutte christique du bien(symbolisé par le personnage curieux et innocent de David Gray et par le couple de domestiques) contre le mal (incarné par le vampire Marguerite Chopin et ses sbires qui terrorisent le village) mais aussi à une sorte de rêve expressionniste où chaque image est un symbole qui renvoie aux angoisses primaires de l'Homme (ombres, toiles d'araignées,faux synonyme de mort...).
Vampyr est donc un film étrange, viscéral, une expérience unique en son genre, un véritable cauchemar lyrique d'1h10 qui ne laissera pas indifférent le spectateur attentif.