Le "Van Gogh" de Pialat est honni par les puristes, sans doute parce qu'il se refuse à toute opposition romantique entre l'Art et la vie (façon Minnelli), et qu'il choisit de ne montrer que la vie (et donc la mort). Pire, l'oeuvre de Van Gogh n'est pas exaltée (les tableaux montrés sont de pauvres copies), et il n'apparaît pas comme un mystique maudit mais comme un être dont on brime la liberté : on l'étouffe avec l'heure des repas, avec ses toiles encombrant la maison de Théo, avec l'exigence de fidélité à la réalité, avec le commentaire de la critique infligé par Gachet... On retiendra surtout deux scènes qui capturent la puissance vitale : celle du déjeuner sur l'herbe, où affleurent le grotesque, l'improvisation, l'ivresse à travers des chansons, les sautes de ton. Celle du cabaret, dernier sursaut, dépense à la fois frénétique et mélancolique, abolissant toute chronologie... comme si la liberté de la main du peintre avait pris le pouvoir ! [Critique écrite en 2004]