Soyons honnête : face à Halloween ou aux Griffes de la nuit, Vendredi 13 a toujours été le parent pauvre. A l'inverse de John Carpenter (Assaut, The Thing, Christine...) et Wes Craven (La Dernière Maison sur la gauche, La Colline a des yeux, Scream...), Sean S. Cunningham ne fait pas parti des cinéastes qui laisseront une marque impérissable sur le cinéma d'horreur américain. Non, Vendredi 13 est un film opportuniste (initié pour surfer sur le succès de Halloween, il cite ouvertement La Baie sanglante de Bava), réalisé sans réel talent de mise en scène. Quant à la saga qui en découle, elle a créé sa mythologie petit à petit (trois films pour que le tueur obtienne enfin son aspect définitif !) et sans réelle cohérence (on passe de 5 films d'horreur sérieux à 5 autres semi-parodiques).
Mais qu'est-ce qui fait le succès de Vendredi 13 ? Indéniablement le charisme de Jason Voorhees, armoire à glace ambulante découpant de l'adolescent lubrique à longueur de journée et apparu dans la saga à partir du deuxième épisode. Avec son allure cool (merci le masque de hockey), il est devenu une icône de l'horreur, un personnage culte. Tout ce qui lui manque, c'est un chef-d'œuvre au sein duquel s'intégrer. Une occasion en or pour le lancement d'un remake ! Le parti pris des scénaristes est ici de rassembler les bonnes idées et intrigues des 4 premiers films de la saga (avant que Jason ne devienne un zombie) et de les compiler dans un film best of. Faute d'obtenir les services d'un réalisateur horrifique possédant son propre style (comme, au hasard... Rob Zombie), c'est le yes man Marcus Nispel, responsable du bien foutu — mais trop classique — remake de Massacre à la tronçonneuse, qui s'y colle. Vendredi 13 ayant toujours plus lorgné du côté du cinéma d'exploitation que les autres slashers de son époque, tous les ingrédients ici réunis laissaient espérer une bonne série B.
Alors, la mayonnaise prend-elle ? Bah, pas vraiment !
Certes, Jason est encore plus charismatique avec son côté Leatherface meets Elephant man, lui donnant enfin l'air menaçant, mais le film souffre des mêmes défauts que ses aînés. A trop vouloir citer ouvertement les premiers opus de la saga, on en oublierait presque que ceux-ci étaient loin d'être exempts de tout reproche. Le vrai problème : les personnages des victimes. Pour faire simple, ils sont presque tous antipathiques. Il manque une Laurie Strode ou une Nancy Thompson, un personnage fort, auquel on s'attache, qui pourrait être notre voisin(e) et qui ne ressemble pas à un mannequin ou une star de porno. Il est vrai que les personnages insipides sont une constante depuis la création de la franchise, mais à l'occasion de ce reboot, peut-être aurait-il fallu élever un peu le niveau ?
Ce remake dispose probablement de l'intrigue la plus étoffée de la saga, mais il ne décolle jamais et stagne dans cette douce médiocrité propre aux épisodes 1 à 7 de la saga initiale. Sauf qu'à la différence de ces épisodes, il n'est jamais sympathique. Ce en quoi, il reste largement au-dessus des épisodes 8 à 10 (+ Freddy contre Jason) et de leur idiotie abyssale. Plus de trente ans après, l'histoire se répète : Vendredi 13 reste le parent pauvre de Halloween.