La critique complète : http://cinecinephile.com/veronica-realise-paco-plaza-sortie-de-seance-cinema/
Après avoir révolutionné le cinéma horrifique espagnol, en relançant la vague du « Found Footage » aux côtés de son compère cinéaste Jaume Balaguero avec les deux premiers volets de la saga [REC], puis signé un troisième volet en solo plus orienté vers la comédie d’horreur, le cinéaste Paco Plaza fait son retour dans l’horreur avec Véronica, ressortant du placard le film d’exorcisme, un genre épuisé avec les films horrifiques qui abusent des clichés du genre, mélangeant le found footage et le film de possession dans le cas de nanars tel que Devil Inside, qui surfe clairement sur un genre relancé par les pères de la saga [REC] qui mélangeait habillement les genres dans les deux premiers films. [...]
Paco Plaza ancre Véronica dans une réalité, tout comme lui et Jaume Balaguero ancrés [REC] dans un aspect réaliste par le dispositif du found footage, le film nous faisant suivre une équipe de télévision dans suit une intervention dans un immeuble affecté par un virus. Et Véronica se place indéniablement dans une esthétique réaliste. Pablo Rosso, directeur de la photographie et interprète de Pablo, le caméraman, dans [REC], signe la photographie de ce nouveau film, qui emploie une esthétique qui se rapproche du réalisme documentaire, notamment en filmant caméra à l’épaule tout en alternant avec des plans fixes et des travelings transversaux et rotatifs dans certaines scènes d’horreur.
Car si les scènes qui suivent le quotidien de Véronica, jeune adolescente de 15 ans en pleine mutation du corps, le sang ayant ici la symbolique claire de la virginité, sont filmés de manière classique avec des plans fixes ou à l’épaule composés, le cinéaste fait preuve d’une certaine inventivité lorsqu’il s’agit de filmer les manifestations dans une tension crescendo, jouant sur l’attente et la lenteur du quotidien pour faire résonner plus fort les moments horrifiques dans leur apogée, tout en cultivant une montée en tension maîtrisée et en refusant le spectaculaire des jumps-scares putassiers (le peu de jumps-scares qui interviennent ici font preuve d’une certaine intelligence en se manifestant au service de la mise en scène). [...]
Les références cinématographiques de Paco Plaza sont claires : il puise dans L’exorciste de William Friedkin dans cette approche viscérale de la maltraitance du corps féminin, chez Dario Argento lorsqu’il s’agit de jouer avec les lumières et les couleurs au niveau d’une esthétique qui rappelle parfois l’esthétique symbolique de Suspiria, ou encore chez John Carpenter avec une bande son composée de sons synthétiques organiques qui donne une ambiance soignée et angoissante. En puisant dans les références majeures du genre, avec parfois de gros sabots et peu d’originalité si ce n’est le défaut franchement mineur de ce film, et en revenant aux origines archaïques tout en questionnant la question du mal dans son aspect symbolique et religieux, avec un premier degré qui embrasse pleinement les clichés du genre, Véronica témoigne d’une véritable démarche d’auteur dans le cinéma de genre espagnol, rappelant au passage l’habille artisan visuel qu’est le co-créateur de [REC]. À la manière de James Wan aux USA, Paco Plaza apporte avec ce film d’exorcisme réaliste un vent de fraîcheur revenant à la source d’un cinéma horrifique longtemps épuisé. Une proposition de cinéma horrifique plutôt bienvenue.