Deux ans après le mal aimable Tre Piani, Nanni Moretti revient, avec Vers un avenir radieux présenté en Compétition officielle au Festival de Cannes, à la veine qui lui a valu ses lettres de noblesse : l’autofiction mêlant vie privée, cinéma et politique. En plein tournage, Giovanni (le vrai prénom de Moretti), son alter ego, qu’il interprète de surcroît, accumule les déroutes de production, et traverse une crise de couple, tandis que sa femme Paola (Margherita Buy, toujours irréprochable) s’émancipe professionnellement et que sa fille s’énamoure d’un sexagénaire.



Assez libre pour contenir les conflits existentiels et créatifs de Giovanni comme autant de micro-récits, la narration de Vers un avenir radieux navigue, à l’instar de son protagoniste, entre humour et mélancolie. Convaincu de réaliser un film sur le Parti communiste italien en 1956, Giovanni se heurte, avec un sens du rocambolesque assumé, à une équipe qui méconnaît son Histoire, et à son actrice principale qui ne voit dans le scénario qu’une bluette. Alors, face à une modernité qu’il peine à décoder, le cinéaste cherche un mode de communication dans le septième art. Pour ce faire, il dialogue avec ses films en chantier, imite facétieusement Marlon Brando, cite Jacques Demy et John Cassavetes, et appelle Martin Scorsese pour lui demander conseil.



À l’image des œuvres récentes de son auteur, Vers un avenir radieux n’échappe pas au passéisme, mais il est ici contrebalancé par une autocritique salutaire et attachante. Car, loin de se donner le beau rôle, Nanni Moretti se remet en question, interroge son parti et sa vision du cinéma pour marcher en direction d’un futur, ne serait-ce que fantasmagorique, plus heureux. Si le monde peut paraître insupportable aux yeux de Giovanni/Moretti — et réciproquement —, il suffit qu’il gesticule sur du Aretha Franklin ou déambule en trottinette (qui a remplacé la Vespa) dans les rues romaines pour que la joie prenne le pas sur la bougonnerie : l’optimisme lui va finalement bien !


Katia Peignois

https://www.surimpressions.be/post/critique-vers-un-avenir-radieux-de-nanni-moretti

Surimpressions
7
Écrit par

Créée

le 30 juin 2023

Critique lue 23 fois

3 j'aime

Surimpressions

Écrit par

Critique lue 23 fois

3

D'autres avis sur Vers un avenir radieux

Vers un avenir radieux
takeshi29
8

Donc j'ai aimé un film de vieux c.. égotique ? Ça en dit plus sur moi que sur Nanni...

Je ne pensais pas écrire ça mais oui "Vers un avenir radieux" est le film de la semaine qui m'a rendu le plus heureux, qui m'a offert le plus d'émotions, sur tous les registres. J'y suis allé sans...

le 2 juil. 2023

38 j'aime

6

Vers un avenir radieux
Plume231
2

Vers un esprit orgueilleux !

Cela faisait longtemps que je n'avais pas vu un Nanni Moretti et, bêtement, je me demandais pourquoi, à l'exception notable de La Chambre du fils, j'avais détesté les quelques films que j'avais...

le 30 juin 2023

24 j'aime

19

Vers un avenir radieux
Moizi
8

L'abandon du pessimisme...

Vers un avenir radieux raconte comment un vieux réalisateur aigri va transformer un film profondément pessimiste sur tous les aspects en un film optimiste et c'est vraiment drôle et touchant.Le film...

le 24 nov. 2023

16 j'aime

Du même critique

À l'intérieur
Surimpressions
5

Art solitaire

La robinsonnade - appellation évidemment dérivée du livre mythique de Daniel Defoe - est un sous-genre du récit d’aventure où un protagoniste, isolé de sa civilisation, se voit contraint d’apprendre...

le 5 avr. 2023

12 j'aime

1

Le Dernier voyage du Demeter
Surimpressions
3

Dracula fait naufrage !

Dans le roman de Bram Stoker, le Demeter, c’est ce navire marchand qui amène à son insu le Comte Dracula sur les côtes anglaises. Un chapitre plutôt secondaire, entièrement raconté du point de vue du...

le 22 août 2023

10 j'aime

1

Un métier sérieux
Surimpressions
7

Une autre histoire du soin

Thomas Lilti nous avait habitués au milieu hospitalier, au médical décliné sous toutes ses formes : des débuts sur les bancs de la fac (Première année) aux premiers pas d’interne (Hippocrate) en...

le 13 sept. 2023

7 j'aime