VICE (Adam McKay, USA, 2018, 132min) :
Cet édifiant Biopic partial détricote de manière ludique les coulisses de la politique américaine à travers le destin de Dick Cheney, vice-président des États-Unis entre 2001 et 2009 dans l'administration du président George W. Bush.
D'entrée de jeu un carton nous indique que tous les faits relatés sont vrais, malgré la difficulté due à la personnalité secrète de Dick Cheney, véritable fantôme tant cet homme arpente les différents couloirs du pouvoir comme s'il n'était pas là, et finalement nous interpelle façon cartoon avec un ironique "Mais putain on a bossé" ! Le ton est donné, la biographie sera incorrecte !
Comme la séquence inaugurale qui montre une voiture zigzaguée sur la route du Wyoming en 1963 avec un alcoolique au volant se faisant arrête par un policier, le film ne va pas arrêté de nous brinqueballé dans tous les sens. On débute dans un bar où un monteur de lignes s'enivre avant de se retrouver 38 ans plus tard au cœur de la Maison Blanche avec le même homme bedonnant qui ordonne calmement d'abattre tous les avions présentant une menace après les attaques terroristes du funeste 11 Septembre 2011.
De son passé de loser jusqu'à son ascension à la vice-présidence, le foisonnant récit très documenté à charge va amplifier la trajectoire de cet homme peut enclin à la politique, tentant de retrouver de la dignité et l'amour de sa femme très ambitieuse en gravissant patiemment les échelons avec fourberie et ironie au milieu de tous les bouffons pathétiques de l'administration Bush. Ce brûlot politique met en lumière les esprits machiavéliques et benêts à tous les postes à travers une voix off décapante. La mise en scène déploie de nombreux procédés satiriques (métaphores de scènes de pêches à la mouche, situations absurdes, allégorie grotesques, faux générique...) pour renforcer la grossièreté de la triste réalité et de manière pessimiste plutôt en rire jaune qu'en pleurer. Car la dense narration dissèque ce spectacle de pantins à travers toutes les différentes gesticulations, manipulations politiques et financières, les distorsions et nombreux arrangements avec la constitution, jusqu'à l'accablant mensonge d'état véridique pour justifier la guerre en Irak changeant géopolitiquement la face du monde tout favorisant les bénéfices d'une multinationale pétrolière dont Dick Cheney a été le PDG !
Vice se déguste à chaud par le biais d'un habile montage mélangeant de véritables images d'archives et des situations satiriques grand-guignolesques cruelles qui se reposent sur des interprétations sidérantes, en premier lieu avec l'outrancière incarnation magistrale de l'immense Christian Bale (Dick Cheney) dont son hallucinante transformation physique se complète avec sa démoniaque justesse de jeu. Le reste du casting est au diapason avec l'épatant Sam Rockwell (George W. Bush), l'impeccable Amy Adams (Lynne Cheney) et le renversant Steve Carell (Donald Rumsfeld) notamment. Une brillante farce tragique militante féroce qui manque parfois de nuances au sein de ce portrait au vitriol sans concession, et convoque comme un écho clownesque l'actuelle présidence de Donald Trump.
Venez déguster au premier degré cet énergique shot cinématographique absurde, où le destin de Dick Cheney symbolise diaboliquement le monde politique américain, qui ne manque pas de vices. Stupéfiant. Effrayant. Jouissif. Grinçant.