Il y a une autre manière de regarder "Vicky Cristina Barcelona", au delà de la réflexion amusée et légèrement morale sur l'impossibilité de l'amour, qu'il soit conventionnel et donc condamné à mourir d'ennui, ou au contraire passionnel, et consumé finalement dans ses propres tourments : car le dernier Woody Allen est aussi un film juste sur les paradoxes de l'expatriation et du tourisme : d'un côté, l'épouvantable communauté "expat", ici américaine, qui ne se donne même pas la peine d'apprendre la langue du pays, et vit renfermée sur elle-même, aidée en cela par la technologie globalisante moderne ; de l'autre, la fascination toute aussi naïve pour l'exotisme des autres, leur belle noblesse, qui, bien entendu, ne résiste pas à l'épreuve de la vie commune. Tout cela est terriblement juste, affreusement pessimiste, et donc réjouissant en diable. Car Allen reste Allen, qu'il s'incarne dans les tergiversations de Vicky effrayée par la passion ou de Cristina théorisant son éternelle insatisfaction ! [Critique écrite en 2008]