Pour son premier long, Thomas Salavador s'attaque au film de super héros décalé et intimiste. Vincent, véritable Namor d'eau douce, voit ses capacités physiques décuplées dès qu'il rentre en contact avec le milieu aqueux. Un peu paumé, misanthrope et taiseux, l'ami Vincent subsiste en faisant des petits boulots de chantiers. Jusqu'au jour de sa rencontre avec la pétillante Lucie avec qui il va partager son secret, sa couche et son cœur.
Totalement centré sur le personnage de Vincent, le film adopte une mise en scène reposante, faite de plans fixes posés et de cadrages réalistes. Pas de musiques, des dialogues réduits à leur strict minimum, le monde du silence déborde largement sur les terres. La rencontre de Vincent et Lucie est d'abord celle de deux corps, des gestes maladroits qui trahissent un désir profond. Un premier baiser hésitant, tant retenu, qu'il explose, sauvage. Thomas Salvadore sait filmer les paysages mais il préfère filmer les corps. Il y a cette scène magnifique de la plus longue caresse du monde qui démontre encore ce glissement, cette fuite du corps de Vincent sur lequel rien n'adhère.
Car le propos du film est bien la fuite, une fuite des réalités, des responsabilités. L'eau, toujours mouvante représentant bien Vincent qui n'arrive jamais à se fixer. Je regrette ce dernier tiers du film où Thomas Salvadore se laisse aller à l'action dans cette poursuite un peu vaine avec les forces de l'ordre. En contraste avec l'austérité des premiers tiers, Vincent use et abuse de ses "pouvoirs", toujours de manière inventive et ludique mais un brin rébarbative.
Une bonne surprise malgré tout qui donne une furieuse envie d'aller piquer une tête.