Margarethe von Trotta est une réalisatrice au long cours, ce que Vision ne nous révèle absolument pas. Filmé au plus simple, le film se veut une biographie de Hildegard von Bingen mais saute d’un évènement à un autre dans des scènes habitées par des petits cubes d’émotions mal dégrossies qui finissent par en faire une œuvre totalement brute – presque autant que ses gros plans télévisuels ou ses décors découpés sans élégance entre deux murs médiévaux qui ont beaucoup plu aux créateurs lors du repérage.
Démontrant au moins par moments que l’abbesse était guidée par la confusion de ses vertus & de son ambition (du moins, c’est ce que la réalisatrice veut qu’on voie), le film ne montre pas vraiment d’amour pour le cinéma ; pour la musique, un peu, parfois. Dans ces instants mélomanes, on arrive à supporter que l’adversité subie par la religieuse soit aussi mal concrétisée au septième art que ses différents projets dans le scénario, lesquels ne la mettent pas en valeur comme une érudite mais juste comme une personne dispersée & confuse qui a connu la gloire par hasard. C’était peut-être le propos, mais il y avait cent façons plus agréables de le faire comprendre, tout comme des manières moins minérales de l’interpréter.
Cachant un peu de sa vocation sur le long terme, Vision arrive à force d’insistance à dresser un portrait d’arrogance & d’humilité ambigu qui était certainement voulu (comme la vérité sur Hildegard est perdue & se doit de ne pas être représentée) mais sans jamais sortir d’un regard beaucoup trop frontal & expressionniste ne convenant ni au film historique ni au thème de la religion – gros syndrome du téléfilm, encore une fois. C’est le genre de film qu’on verrait bien dans un musée : vous savez, ces clips qui passent en boucle. Avec von Trotta, c’est juste plus élaboré.
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