We're like crystal, we break easy | I'm a poor man, if you leave me *
Depuis des années, Woody enchaîne les films à la vitesse de l'éclair, avec pas loin d'un par année. Lui-même reconnaît sans peine qu'il n'en considère que très peu comme de vraies réussites dont il est vraiment fier, et il faut bien avouer que les productions sont un peu inégales, avec quelques rares éclats.
Mais tout de même, je n'y ai jamais trouvé d'étron pur et dur, de truc vraiment nul, tout est généralement au moins passable, avec la patte du réalisateur. "Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu" s'encastre parfaitement dans cette continuité qui confirme le réalisateur américain comme un véritable auteur. Sans être époustouflant, on est en terrain connu, sans surprise. Dialogues en général travaillés (même si moins que dans d'autres films), thèmes multiples et chers à l'auteur, casting alléchant remarquablement dirigé, aucune interprétation ne fait tâche.
Crise domestique du couple (des couples), avec comme invités les parents, dont un a peur de la vieillesse et de la mort, et l'autre en pleine crise existentielle et surtout spirituelle. Questions artistiques qui taraudent l'écrivain lui aussi en manque d'inspiration et crise professionnelle, qui trouve sa "muse" (elle aussi plus jeune que lui, en effet miroir du père de Sally) qui ne lui apporte nullement l'inspiration qu'il trouve finalement chez un mort qui ne l'est pas vraiment. Science représentée par un écrivain qui se moque de la mère de Sally qui consulte une diseuse de bonne aventure, mais qui écrit de la Science-Fiction pour transformer le réel et qui croit en une forme d'inspiration artistique un peu magique, contre la spiritualité moins terrestre et agrémentée de whisky d'Helena. Art encore chez Sally qui se sent oppressée par la crise domestique qui lui donne un sentiment de gâchis, d'avoir raté le coche qu'elle essaie de rattraper d'abord avec son patron, puis avec l'espoir de s'émanciper avec sa propre galerie.Désillusion des deux côtés. Et regard final sur le bonheur d'Helena et Jonathan, les seuls à sortir indemnes de ces turbulences.
Vous n'aurez pas manqué de le noter, si tous ces sujets s'entremêlent, avec une vision comme souvent ironique et un peu cynique de la part de Woody Allen, ils ont tous en point commun le mot qui revient le plus dans le paragraphe ci-dessus : crise. Le cinéaste américain, lui, ne semble pas vraiment en traverser, sur le plan de la quantité en tout cas. Sur celui de la qualité, c'est moins vrai, mais il parvient tout de même à créer une succession de films qui doivent se voir non comme des unités, mais comme parties d'un ensemble. Si comme unité, le film n'a rien d'exceptionnel, son inscription dans cet ensemble filmographique permet un regard plus intéressé.
* http://www.youtube.com/watch?v=eH-GzcgZj48