Femme Fatale, la célèbre chanson de The Velvet Underground aurait-elle été écrite et composée en hommage à Margo, personnage incarné par Faith Domergue dans cet aller simple pour l'enfer orchestré par John Farrow ?... Cela aurait pu être crédible si Edie Sedgwick n'avait pas croisé la route du fameux groupe new-yorkais. Quoi qu'il en soit, le destin professionnel sera un peu le même pour ces deux comédiennes qui connaîtront leur quart d'heure de gloire sous la protection d'un nabab, en l’occurrence Andy Warhol en ce qui concerne Edie et Howard Hughes pour le cas de Faith. Cette dernière n'a que 15 ans lorsqu'elle croise le chemin de l'aviateur et homme d'affaires à la fortune colossale qui, en échange de faveurs charnelles, lui promet d'en faire une star planétaire. Les critiques de l'époque la jugeront malheureusement fade dans Voyage Sans Retour, film produit pour la RKO que Hughes dirige alors. Face à cette déconvenue, le pygmalion ne renouvelle pas le contrat de Faith et lui tourne définitivement le dos.
Et pourtant, les critiques avaient tort. Face à un Robert Mitchum littéralement métamorphosé en victime passive, Faith Domergue inonde l'écran de sa prestance. Tour à tour manipulatrice, menteuse pathologique et meurtrière psychotique, la comédienne transcende le personnage de Margo et fait plier Mitchum qui devient ici un simple faire-valoir à une époque où sa renommé est à son paroxysme. Et en ce sens, le comédien est plus que parfait, raide dingue amoureux qu'il est de cette étrange jeune femme qu'il vient de rencontrer et qui ment comme elle respire. Le merveilleux héros de La Vallée De La Peur et de La Griffe Du Passé devient ici, physiquement et psychologiquement, une véritable loque éperdument épris d'amour malgré ses doutes et reste inconditionnellement prisonnier dans une toile d'araignée pernicieusement tissée par une femme fatale de plus en plus chtarbée au fur et à mesure du déroulement narratif.
Avec, en prime, Maureen O'Sullivan et Claude Rains dans des seconds rôles, Voyage Sans Retour s'érige incontestablement au sein des réussites du genre. "La quintessence du film Noir" dira Serge Bromberg à son propos. Peut-être, oui... Quoi qu'il en soit, assurément un très bon film.