Si la tentation vertigineuse de notre propre disparition (ainsi que le plaisir pervers d'en mesurer l'impact sur ses proches) est suffisamment universelle - du moins je le suppose - pour constituer un bon sujet de livre ou de film, "Wakefield" est surtout une démonstration de ce qu'il ne faut pas faire. D'abord réduire ce "vertige métaphysique" de l'effacement à un banal coup de stress vis à vis de l'usure du couple et la sauvagerie du monde professionnel. Ensuite banaliser la "perversité" du voyeurisme en le ramenant à la reconquête de son propre sentiment amoureux, titillé par la jalousie et la rivalité masculine. Mais surtout, prendre soin de tout bien expliquer à travers monologues, voix off et flashbacks évacuant toute zone d'ombre. Bref, faire de la psychologie et de la sociologie au petit pied, là où il aurait fallu du trouble, de l'ambigüité, voire même, mot honni à Hollywood, de la "philosophie". En l'état, on a un petit film guère passionnant, puisque la mise en scène échoue à creuser derrière la surface des choses, et se limite à une description appliquée d'une survie assez banale. Il est intéressant de parler de la fin de "Wakefield", puisque mon premier réflexe a été de trouver pertinente l'irrésolution finale qui nous évite le happy end qui pointait... avant de réaliser que cette suspension ("I'm Home !") a tout d'une solution de facilité bien peu honorable. Sinon, on devra bien admettre que Cranston fait le job, comme toujours, et que Jennifer Garner, qui n'a pas grand chose à jouer, est toujours aussi divine... [Critique écrite en 2017]