Cela fait 700 ans que l'humanité a déserté la Terre, devenue un dépotoir cauchemardesque. Les montagnes de détritus côtoient les ruines de buildings, uniques vestiges d'une planète ravagée par les excès de l'Homme. Une seule chose bouge encore ici-bas: Wall-E robot compacteur de déchets. Dernier représentant de son unité, il sillonne un paysage de désolation et passe ses journées à compacter. D'une nature très curieuse et débrouillarde, le petit robot est cependant très seul. Jusqu'au jour où il rencontre une sonde robotisée nommée Eve, qui est envoyée sur Terre afin d'y trouver une trace de vie. Wall-E tombe fou amoureux de l'androïde et fera tout pour rester à ses côtés...
Si cette histoire d'amour cosmique avait tout pour plaire, il n'était pas aisée de la rendre accessible à tous. Elle est pourtant la création de Pixar. Et pour la traiter, le studio d'animation fait preuve d'une audace folle. Les 20 premières minutes sont quasi-muettes, l'ambiance est sinistre, et le propos désespéré. De plus, il faut noter que notre héros et sa bien-aimée communiquent par des sons et non par des mots. Il faut avouer que pour un film d'animation, destiné aux petits et aux grands, et budgétisé à 180 millions de dollars, c'est un sacré défi.
Mais chez Pixar, relever les défis, c'est une vocation. Par le passé, on a été transporté par les aventures d'insectes (1001 Pattes), émerveillé par les monstres se cachant dans nos placards (Monstres et Cie), et rassasié par un rat chef de cuisine (Ratatouille). Wall-E complète cette galerie d'anti-héros, et de quelle façon. Pour être honnête, il est le film le plus beau et poétique du studio. Les risques pris deviennent rapidement les forces de cette nouvelle création. Tour à tour, Wall-E amuse, émeut et interroge. Avec inventivité, les animateurs du studio à la lampe parviennent à rendre Wall-E, Eve et la batterie de robots qu'on rencontre plus expressifs que jamais.
Il est difficile de ne pas le considérer comme le 2001 de Pixar (film qu'il évoque clairement), tant son discours sur l'Homme et ses créations renvoie au classique de Stanley Kubrick. L'espèce humaine ne créé-t-elle que pour se déresponsabiliser et accroître son apathie? Ses créations finiront-elles par la dépasser, en obéissant à des valeurs qui devraient être les siennes? On pourrait penser que oui, en regardant notre héros. Simple robot de nettoyage, Wall-E semble avoir acquis une conscience. Il trie, répare, apprend au contact du peu de bien qu'a laissé l'humanité sur Terre (notamment la culture). Et devient la figure contestataire au sein d'une mécanique trop bien huilée (saluons l'ironie d'inverser les rôles entre la machine et l'humain).
Tant qu'il restera quelqu'un pour protéger et transmettre le savoir, l'espoir perdurera semble nous dire Pixar.
Un chef-d'œuvre absolu qui n'aura aucun mal passer les années, les décennies. On devrait le rebaptiser "Wall-E: l'Odyssée de l'Espoir". Il le mérite.