Alors que Ratatouille était pour Pixar le film des paradoxes, Wall-E est le film défi.
Un coup de force.
Le héros n'est plus un animal trop mignon, un jouet vivant ou un super-héros.
Mais un robot. Laid, mécanique et sale.
Et pourtant si attachant...
Et pourtant si muet !
Car là est le premier tour de force du film ; proposer, à un public souvent composé d'enfants (mais ce film prouve admirablement que les enfants ne sont pas la seule cible) une première demie-heure de film silencieuse, composé uniquement d'effets sonores remarquablement réalistes. Wall-E c'est le dernier robot éboueur laissé sur une planète abandonnée à elle-même, vidée de tous ses humains, eux qui l'ont saccagée, polluée et qui ont dû la fuir.
Le revers de la médaille.
C'est là le deuxième tour de force du film ; les humains ne valent plus rien, ne sont plus qu'ombre néfaste de ce qu'ils ont pu être, réduits au stade d'obèses immobilisés ayant perdu l'usage de la communication, de leurs membres, et de leurs sens.
Plongé dans une société aseptisée où même le temps et l'heure sont manipulés, ce sont peut-être eux les vrais déchets.
C'est donc dans un film Pixar que l'on voit évoluer cette société dystopique, qu'un simple robot (à qui les studios prêtent une humanité plus forte que celle des vrais humains) va tenter de renverser, plein, comme toujours, d'une naïveté et d'une détermination touchante.
Wall-E c'est un flot interrompu d'émotions, que ce soit grâce à l'humour merveilleux (notamment les passages avec les robots bugués que la société emprisonne), ou grâce à une tristesse certaine (comment ne pas ressentir de la peine pour cet adorable robot qui fait tout pour sauver et protéger l'amour de sa vie, la délicieuse Eve ?).
Mais ce qui prime c'est bien sûr l'émerveillement.
Emerveillement face à un film d'une maturité qui rivalise, en utilisant tous leurs codes, avec les plus grands films de science-fiction.
Emerveillement face à un film qui propose une animation jamais-vue, dépassant ici les limites de tout ce qu'on avait pu voir auparavant (le voyage dans l'espace, et la danse avec Eve, immenses moments de cinéma, bercés par la sublime bande originale de Thomas Newman).
Emerveillement tout court.