Dans le paysage de l'animation en stop-motion, avant que le studio Laika ne bâtisse son chemin dans la gloire et la lumière (mais pas l'oseille, hélas... pas ces derniers temps, en tout cas) par ses œuvres (voire chef d'oeuvre dans le cas de Kubo et l'épée magique), c'était les créatifs d'Aardman qui était sous le feu des projecteurs.


Studio anglais fondé dans les années 70 et fondé par le duo David Sproton et Peter Lord, il fut le précurseur du stop-motion au Royaume Uni et plus particulièrement de la ''clay-motion'' (animation à base de matière modulable tel que la pâte à modeler) (le principe de fabrication existait déjà au
sein des milieux d'art dans les années 30 mais c'est Aardman qui a aidé à populariser le concept).
Pendant près d'une décennie, ils bâtirent sa réputation par des cours métrages et des séries télé dont une qui fut une clé de voûte de leur succès et par la suite l'un des symboles de la culture anglaise : Wallace et Gromit.


Ce célèbre duo composé d'un inventeur un peut benêt amateur de fromage et sa réplique culte :



Chessy !



toujours suivi de son chien muet mais malin et loyal ; un duo célèbre qui a fait l'objet d'une série et de quelques court-métrages réservé pour le grand écran. Mais c'est à la fin des années 90-début 2000 que jaillit telle une carotte l'idée d'un long métrage de l'esprit de son créateur, tête pensante importante et artistique de Aardman : Nick Park.


Avec le soutien financier de Dreamworks (qui fut leur producteur principal à leurs débuts dans les longs-métrages pour 3 films), 5 années de travail et une centaine d'animateurs, le résultat final sortit en salles en 2005.


Et une chose est sûre aujourd'hui : Aardman ne s'est clairement pas planté. Avec des recettes presque équivalent au double de son budget (30 millions ; beau résultat pour l'époque), un Oscar du meilleur film d'animation et des critiques positives qui perdurent encore, le film est perçu comme le chef d'oeuvre du studio aux côtés de Chicken Run. A t'il tenu les années et avait t'il les... oreilles pour le mériter ?


L'histoire se déroule dans la campagne paumé d'Angleterre ; nous suivons l'histoire de Wallace et Gromit reconvertis en protecteurs de potagers et chasseurs de lapins sous le nom de Anti Pesto, adorés par toute la ville pour leur efficacité malgré le fait de cacher aux habitants le fait qu'ils gardaient les lapins chez eux au lieu de les tuer (pas étonnant... si ils savaient ce qu'on pense aujourd'hui de certains petits animaux de ce genre comique dans la fiction). Pour pallier au problème de destruction botanique (et pour éviter l’option massacre de lapins), Wallace opte pour une solution de rééducation mentale par l'une de ses inventions.


Un idée recevable sur le papier mais qui va se solder par un bel échec, son esprit ayant été interverti en partie par l'un des lapins cobayes par sa machine.


Sauf que, pas de chance, une plus grosse menace plane sur les potagers de la ville : un monstre surpuissant capable de outrepasser les pièges de l'Anti Pesto, détruits comme du petit bois. Le duo va devoir faire face à ce gros problème, aider la grande dame du coin (Lady Tottington) tout en faisant attention à Victor Quatermaine, un chasseur notoire anti-lapin qui adore astiquer et tirer avec son fusil sur les animaux, cherchant à convoiter la main de la Lady et à obtenir sa fortune avec... Et de faire en sorte que le festival annuel du Légume du patelin ait lieu sans imprévu, aussi.


Ne tournons pas plus autour du pot : malgré les années qui se ressentent, le film reste une petite merveille d'humour et de créativité. Avec sa prémisse, Nick Park, Steve Box et leurs équipes profitent de ce long métrage pour adresser tout au long leur amour pour les vieux films de monstres de l'époque : que ce soit l'annonce du titre faisant référence aux films de série B, la dite menace basé sur le loup garou ; le film appuie sur son hommage et va à fond de son délire.


On peut ajouter La création de Frankenstein lors de l'expérience sur les lapins, le Dracula de Francis Ford Coppola qui a clairement servi de modèle pour le design du prêtre du village ou même une référence à King Kong lors de son final, avions inclus.


D'ailleurs, malgré son statut de film public, l'équipe ne se gêne vraiment pas pour les blagues suggestives : que ce soit l'aspirateur à nuisibles qui a choisi le terme ''s***'' pour les renvoyer dans leur trou, les remarques sur les carottes


le piège du duo à base de marionnette lapine géante où Gromit doit singer l'allumeuse avec ses ficelles ... si, si, c'est un gag réel ^^'


ou encore la pose de Lady Tottington auprès de Wallace pour lui montrer sa bonne grosse paire... de melons ^^. Comme on dit, ''film pour enfants !''


Mais qu'on se rassure, l'humour du film ne repose pas que sur ça ; il sait jouer également avec :



  • le comique du situation (Wallace et son envie maladive du fromage qui lui joue des tours, la perruque de Victor tout le temps dégradé voire remplacé ou simplement les lapins qui s'avèrent être de sacrés casse-pieds manieurs de dentiers et n'ont pas honte de littéralement crier au loup)


  • le comique visuel (la disposition visuelle des tableaux des clients du Pesto avec leur regard flippant, la croix du prêtre constitué de courgettes, la tête de l'agent de police qui risque de se faire surnommer tête de... pine...) (ouais, je sais pas comment le dire autrement).



J'en passe et des meilleurs... De l'humour qui peut être jugé en majorité comme classique ou cliché aujourd'hui mais qui passe encore bien (pour la plupart) grâce au rythme et la créativité visuelle.


D'ailleurs, par son sujet de monstres, le film en profite pour traiter du thème de la superstition des villageois, terrifiés à l'idée de perdre leurs précieux légumes qui constituent leur fierté, ainsi que de l'emploi de la violence, le fait de l'emploi de la violence envers les lapins (qui peut s'appliquer aux animaux) malgré la haine des habitants (un peu cliché aujourd'hui mais reste efficace).


Même si... le cas de leur défense peut s'avérer assez discutable aujourd'hui (demandez en Australie, ils apprécient pas des masses les lapins là bas... et vu la végétation rasée d'année en année par ces bestioles et l'écosystème bouleversé, on peut comprendre que certains veuillent appliquer la méthode massacre de Victor).


J'en viens d'ailleurs au gros point noir du film : son utilisation de clichés assez maladroite. Car si on peut comprendre et apprécier l'antagoniste et ses motivations ainsi que l'humour et ses situations, ça devient un peu compliqué quand l'humour sert presque de prétexte pour des moments qui frisent la limite ou surtout pour forcer le scénario ; genre, quand Victor claque inutilement ses munitions précieuses pour calmer la foule ; la gestion des lapins qui, comme je l'ai expliqué, peut s'avérer discutable ou tout simplement


Le final qui va à fond dans le cliché avec sacrifice héroïque de Wallace pour sauver Gromit du crash et petit moment de tristesse et nous laissant croire que ce cher Wallace est ''mort'' ; même si ça sert de prétexte pour confirmer sa retransformation en humain avec son amour pour le fromage, ça reste un gros cliché gênant même pour l'époque. A ce propos, pourquoi un évanouissement provoquerait la transformation inverse de lapin à humain ? Sur quel critère ? A moins que Gromit ait pensé à repasser son partenaire à la machine provocatrice du problème par la suite...


Mais bon, malgré le chipotage cité et les deux trois petits soucis techniques signes de l'âge du film, ce dernier reste encore une valeur sûre du studio. Au vu de son ancienneté et en dépit de sa situation financière actuelle, Aardman a su continuer sur sa voie de l'humour bon enfant, british et intelligent sans trop de crainte ni souci tout en servant de source d'inspiration pour de nombreux créateurs. Je n'espère qu'une chose, qu'ils continuent sur cette voie sans fausse note et nous servent du contenu drôle et toujours créatif (je verrai bien avec le dernier film Shaun le Mouton... ou... la Ferme contre-attaque ?).


Une chose est sûre, Aardman reste bien mieux loti avec les traductions de ses titres de films que Disney... ^^

Jadenterre
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le 18 oct. 2019

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