Terry Monroe (Alexander Skarsgård) et Bob Bolaño (Michael Peña) sont deux flics d’Albuquerque (au Nouveau Mexique) totalement corrompus n’exerçant leur métier que pour s'enrichir au mépris de toutes les lois. Jusqu'au jour ou ils font face à un criminel pour une fois pire qu'eux.
Avec Au dessus des lois, le scénariste-réalisateur John Michael McDonagh (Calvary , L'irlandais) quitte son Irlande pour offrir, comme son frère Martin a pu le faire avec In Bruges ou Seven Psychopaths, une relecture d'un genre typiquement américain le Buddy movie dont il reprend les codes narratifs et esthétiques codifiés par la télévision (Starsky et Hutch est cité a travers la voiture du duo et ses dérapages et des thèmes musicaux très seventies) et bien sur par le tandem Shane Black / Joel Silver pour en offrir une vision décalée qui prend la forme d'une comédie noire et absurde.
Si Shane Black lui-même avec des films comme The Nice Guys ou Kiss Kiss Bang Bang a déconstruit le genre "de l'intérieur" John Michael McDonagh en donne une vision "extérieure" à la sensibilité européenne plus "auteurisante".
Les archétypes du genre sont bien observés on y retrouve le duo de flics constitué d'un père de famille et d'un solitaire déjanté , un méchant "européen" dépravé et un homme de main sadique . L'action ne se déroule pas à Los Angeles mais sous le soleil du Nouveau Mexique lui donnant un aspect provincial et permettant aussi à McDonagh au passage de jouer avec des paysages de western (à noter la magnifique photographie de Bobby "99 homes" Bukowski) .
Car l'Amérique d' Au dessus des lois n’adhère pas à la réalité c'est une reconstruction qui semble provenir de souvenirs de films et de séries télé des années 70 . Les costumes d'époque différentes, les voitures vintage, le score funk de Lorne Bafle et les transitions horizontales rétro contribuent à donner à créer un lieu hors du temps. Malgré leurs plaques Bob et Terry toujours en costumes trois pièces ont un comportement de criminels à la Quentin Tarantino (ils débarquent même sur une scene de crime cheeseburgers en main) mais les références de McDonagh dépassent la pop-culture américaine chère à QT puisqu'elles vont de la mythologie grecque ou la philosophie comme dans les discussions entre le personnage de Pena et sa femme (Stephanie Sigman vue dans SPECTRE) une coiffeuse féministe passionnée d'existentialisme. Le film s'offre même une parenthèse absurde en Europe dans un pays à l'exact opposé du Nouveau Mexique.
Comme le suggère son titre original War on Everyone (guerre à tout le monde) Au dessus des lois sert de prétexte à son auteur pour provoquer le "politiquement correct" en se moquant de manière frontale des sujets les plus délicats : obèses, transsexuels, Musulmans ("c'est bon n'allez pas commencer un Jihad" hurle Terry à deux femmes en burqua avec qui il vient de disputer une partie de Tennis) , les bavures et le racisme dans la police ("“c'est le commissariat de police on est entouré de gros porcs racistes!"). Au travers d'éléments comme la romance interraciale entre Terry et Jackie , il est clair que cet humour transgressif n'est en rien haineux mais je lui ai trouvé un aspect un peu gratuit.
McDonagh se repose sur un très bon casting : Pena est parfait en flic pourri à la répartie cinglante qui utilise la bravade comme une arme mais c'est Alexander Skarsgård qui se distingue le plus cachant derrière son physique de dieu viking un véritable "character actor". Son Terry est un Colosse voûté comme un homme de cro-magnon dans son costume trois-pièces , en permanence alcoolisé avec une propension pour la violence et les ballades country de Glenn Campbell. Terry déteste tout le monde en dehors de son partenaire : raciste , misogyne il a rejoint la police car “on peut tirer sur des gens sans raison" mais va finir par se transformer au contact de Jackie majorette ex-compagne d'un criminel - Tessa Thompson (Creed) qui malgré une bonne entente avec Skarsgård (particulièrement effective lors d'une scene de danse) a peu à jouer - et d'un enfant fugitif dont on devine qu'il partage avec lui les même traumatismes avec qui il va tenter de se constituer une étrange famille recomposée.
Reggie Malcolm-Barrett en indicateur black à la Huggy les bons tuyaux est excellent car il semble être le seul personnage du film à avoir conscience d'évoluer dans un univers absurde. Caleb Landry Jones (X-Men le Commencement) est malsain à souhait en homme de main efféminé entre David Bowie et le Scorpio de Dirty Harry. Aprés des années à jouer les jeune premiers Theo James (Divergente) savoure clairement la chance d'interpreter ce méchant Bondien complètement débauché et psychopathe.On prend plaisir a retrouver Paul "Mad about you" Reiser dans le rôle du supérieur de Bob et Terry d'une extreme patience malgré leur flagrant mépris pour toute autorité.
A mes yeux Au dessus des lois souffre de sortir si prés du The Nice Guys de Shane Black, si le film est constamment drôle j'ai eu du mal à adhérer aux intentions de Mc Donagh qui semblent se perdre au milieu d' incohérences stylistiques et narratives, le film peine à trouver une unité entre pur burlesque à la ZAZ , pastiche Tarantinesque et comédie existentielle absurde.
Conclusion : Au dessus des lois est une relecture en comédie absurde du buddy-movie pas entièrement convaincante malgré un excellent casting et une bonne réalisation.