A 17 ans, Bilal, kurde irakien tout juste arrivé à Calais, prétend, après un premier échec, rejoindre l'Angleterre à la nage. Le maître-nageur, c'est Vincent Lindon en bon français grognon, indifférent, comme la plupart, au sort de ces centaines de réfugiés qui errent dans la ville.
Lorsqu'il relate la réalité et le quotidien des migrants, entre précarité et surveillance policière, lorsqu'il évoque la répression des autorités et leur inhospitalité, Philippe Lioret témoigne utilement et efficacement. Le registre humain et social du film, son propos humaniste, l'apparentent au cinéma de Ken Loach, en moins rigoureux. Car le réalisateur tend à verser , insensiblement, dans le mélo et les conventions. Je veux bien croire que le jeune et volontaire Bilal a la témérité de traverser la Manche à la nage; j'ai plus de mal à envisager Simon, son prof de natation, par ailleurs ennuyé par la police pour son soutien à l'adolescent,
s'enticher de Bilal comme du fils qu'il n'a pas
au prétexte, peut-être, de vivre mal sa solitude.
Vincent Lindon est certes irréprochable mais son attachement paternel à Bilal, son altruisme soudain, semblent arriver moins naturellement que comme un artifice scénaristique. La seconde partie du film, moins "documentaire" dans son exposition du problème des migrants, est aussi plus convenue dans le sentimentalisme.