Coucou, tu veux voir mon film ?
Il est impossible de ne pas avoir entendu parler de ce ""brûlot"" qu'est Welcome to New York d'Abel Ferrara. Ou alors tu es aveugle et sourd. Mais si tu réussis à me lire, c'est que ce n'est pas le cas. Par conséquent, je vais te demander ce que tu sais du film. Comme ça, en vrac, tu me sors le nom de DSK, tu me dis qu'il y a du sexe, beaucoup de sexe, soit parce que les médias te l'ont dit, soit parce que tu as vu le film. Si c'est le cas et que tu penses ce qui a été cité plus haut, c'est que tu n'as rien compris au film.
Welcome to New York fait état de la vie de Devereaux, un malade sexuel sans prénom qui, on oublie de le préciser, est en pleine crise identitaire, qu'il cherche à oublier entre prostituées et éjaculations milk-shakiennes entre amis. Un jour, alors qu'il sortait de la douche, qui, comme on le sait, est une activité propice à l'introspection et au questionnement, il tombe nez à nez avec la femme de ménage de l'hôtel. La question est simple : "Savez-vous qui je suis ?". La bougresse ne daigne répondre. La réponse était à portée de main, il tentera de l'extorquer avec son organe génital. C'est à ce moment précis que ce qui était jusqu'ici une quête initiatique part totalement en cacahouète.
Devereaux oublie son portable, sûrement le moment le plus déchirant du film. Confiant dans ce monde abject, il attend que celui-ci lui rende le précieux artéfact. Il se fait arrêter. La femme de ménage qui avait si peu coopéré a enfin décidé de donner sa réponse : Devereaux est un violeur (c'est abusé, il s'était JUSTE "branlé contre sa bouche"). Toutes les infamies sont possibles : outre le fait qu'il n'a plus son BlackBerry bien aimé, on l'enferme, lui, le responsable d'une grande institution internationale, dans une cellule avec de pauvres wesh wesh noirs. On le force à se déshabiller intégralement ; le spectateur est forcé de voir Gérard Depardieu en 2014 se déshabiller. Mais cela n'est rien, strictement rien, comparé à l'horreur sans nom qui suit ces instants déjà pénibles : quel déchirement de devoir assister à ce pauvre et gras homme en train de lutter, de s'escrimer, de s'acharner... à enfiler une paire de chaussettes. Ferrara a enfin donné un nom à l'horreur, et ce n'est pas beau à voir.
On comprend ensuite que Simone, sa femme, n'est pas très gentille. En fait, pendant de longues scènes de dialogues entre elle et son mari, on apprend que c'est elle qui lui a pris son identité, que toute sa vie, Devereaux n'a fait que tendre à réaliser les rêves de sa femme. La femme de ménage avait tort. Il n'était pas un violeur. Il était Simone.
Plus sérieusement :
1. Si tu fermes les yeux durant la première heure de Welcome to New York, tu as l'impression de mater une rule 34 avec Pumbaa ou Obélix.
2. Au final, Devereaux, ce n'est pas que DSK, c'est également et surtout l'incarnation des fantasmes, de la misogynie et du racisme d'Abel Ferrara.
3. M. Ferrara, loin de moi l'idée de vous donner des leçons de cinéma, mais le but d'une ellipse, ce n'est pas de couper des préliminaires pour pouvoir passer directement au coït, c'est de sauter toute scène inutile à la progression du film. Mais je vous comprends, si vous deviez appliquer cette règle stricto sensu, votre chef-d'oeuvre n'aurait probablement jamais vu le jour.
4. Autre chose : faire un doigt, c'est pas compliqué. Il suffit de lever le majeur face au visage de la personne visée. Essayez, la prochaine fois, ça vous coûtera encore moins cher qu'un film au rabais. Si si, je vous assure !
5. Beaucoup ont craché sur le film mais ont trouvé génial qu'il sorte directement en VOD. Allez, prends ça, la chronologie des médias ! Oui, enfin, ça existait déjà avant, ça s'appelait le direct-to-DVD et honnêtement, il y a 10 ans, Welcome to New York aurait eu ce label.
Point.