Dans le West side new-yorkais des années 1950, les rivalités font rage entre le gang des Jets et celui des Sharks. Aussi, quand Tony (Richard Beymer), ancien chef des Jets, tombe amoureux de Maria (superbe Natalie Wood), sœur du chef des Sharks, cela peut difficilement passer pour une bonne idée… En effet, les conflits se multiplient entre les deux bandes, et leurs chefs respectifs se provoquent en duel…
Récompensée par 10 Oscars, cette libre transposition du Roméo et Juliette shakespearien dans le New York des années 1950 n’en finit pas d’éblouir par ses nombreuses qualités. C’est d’abord à la musique de Bernstein que le film de Robert Wise et Jerome Robbins doit sa réussite. Il est en effet rare de voir une comédie musicale dont on parvient à se souvenir avec une telle aisance de la totalité des thèmes, tous aussi marquants les uns que les autres, du sublime Maria au pétillant I feel pretty, de l’exubérant America à l’intimiste et grandiose One hand, one heart, en passant bien sûr par le célébrissime Tonight.
La chorégraphie de Jerome Robbins, en parfaite adéquation avec la musique, parvient, elle, à transcender le côté très ésotérique de la danse contemporaine pour nous offrir un résultat, certes pas toujours très harmonieux, mais constamment impressionnant, qui occupe et magnifie les paysages urbains avec un talent rare.
Quant à Robert Wise, il assume pleinement le passage de la scène à l’écran pour nous offrir un film à la mise en scène ample et travaillée, qui éblouit malgré l’artificialité de certains procédés. Il parvient en effet à jongler de manière étonnante entre l’aspect léger propre à toute comédie musicale et le côté oppressant de la tragédie shakespearienne, dont les enjeux transparaissent ici très clairement dans toute leur profondeur, et particulièrement
le quiproquo fatal, dont Doc (extraordinaire Ned Glass) est à la fois la victime et le propagateur.
C’est ce quiproquo qui mène à un final sombre et grandiose tout-à-fait digne de Shakespeare, à cela près
qu’il nous épargne le suicide de l’amante désespérée.
Un final au tragique sublime, qui fait amplement mériter à West side story son statut de chef-d’œuvre.