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Il faut souffrir pour être grand. Vouloir devenir le nouveau Charlie Parker quand on est jeune, l’esprit naïf, est un parcours semé d’embûches qu’il nous faut éviter de la meilleure façon possible, résister et y faire face, prendre le contrôle et la direction du courant. Vous ne rêvez pas, le film de Damien Chazelle (acclamé comme un chef d’œuvre au dernier festival de Deauville) propose cette vision poussiéreuse et foncièrement banale de la vie d’un batteur jazzy sur la rampe de lancement de sa carrière. Le jeune Andrew (Miles Teller, déjà remarqué dans "The Spectacular Now", seul et unique teen-movie potable de 2014), doit défier son « maître tyran » interprété par l’impeccable J.K Simmons. Ce dernier, ne cherchant rien d’autre qu’à créer de nouveaux génies, va utiliser ses disciples tels des chevaux de courses, allant jusqu’à les rendre agressifs comme des chiens de combat (plus effrayants que ceux de "White God", rassurez-vous).

"Whiplash" n’a en soit aucun problème. Bien écrit et au propos conséquent, il choisit malheureusement de n’en faire pas assez plutôt que trop. Jamais le film ne dévie de son objectif, mais au contraire préfère rester dans une sorte de radicalité modeste, tentant d’instaurer plusieurs micros climax pour donner la puissance nécessaire aux scènes les plus dures et attristantes. A force de se répéter, le film acquiert une monotonie agaçante dont les petites variations ne produiront aucune émotion concrète et permanente. Lorsque tout semble opter pour du hors-piste à l’image de la mini love story d’Andrew, Chazelle ne fait que survoler la question et esquive maladroitement les pièges qu’il se tend. Le message est trop clair et déjà vu pour convaincre : Andrew doit tout abandonner pour devenir un batteur fils de Dieu, morfler et saigner à blanc. Toute la mécanique scénaristique qui pourrait surprendre s’imagine donc avec des temps d’avance, faisant passer ces moments comme purement artificiels tel que l’accident de voiture ou l’apprentissage de la mort d’un disciple de Terrence Fletcher.

Reconnaissons néanmoins que le film commence à se surpasser dans sa toute dernière séquence, d’une force et d’une jouissance proprement sidérante. Enfin, Andrew attaque avec ses armes : son jeu de batterie, qui écorche et transperce littéralement Fletcher autant par sa médiocrité (premier morceau) que sa virtuosité sans égale (dernier morceau). Nous voilà enfin devant un grand film sur la musique anti démonstratif repoussant ses limites, dans une exaltation virevoltante de grâce et de volupté qui confère à Andrew la force impulsive lui donnant tous les droits. Le jeune cinéaste a adapté l'un de ses courts métrage, et il faut bien avouer qu’hormis cette belle note finale le résultat dégage une odeur rance et fait de son cinéma ni plus ni moins qu’un instrument à vent.
Forrest
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le 28 déc. 2014

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Forrest

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