Madre Eva Green disparaît du jour au lendemain. Sa caisse, ses vêtements, ses valoches trônent fièrement dans le dressing, le garage et le placard. Respectivement. Ou presque. Bref. Mais que fait la police? Sérieusement ils se foutent de nous, ils sont pas flics, c'est pas possible. Ils sont peintres en bâtiment ces gars-là ou quoi? Cas d'école numéro 2. Ouvrez vos manuels page 5 : quand une épouse disparaît le témoin principal c'est... Le..... Le maaa... Le mamaaa... Bande de petits génies analphabètes. Dix secondes! Dix secondes il m'aura fallut pour trouver le coupable. Dix putain de secondes. J'ai été encore plus vite que cette tête à claque d'Horatio (c'est gratuit ça). Même les potes un peu cons de Shailene l'avaient eu (ça aussi c'est gratuit, mais voyez plutôt : une pote black obèse qui bouffe de la glace et sirote des sodas à chaque fois qu'on la voit et un pote gay un peu fofolle plus préoccupé par son trou d'balle que sa coupe de cheveux... ça y vas les clichés)..
L'important est ailleurs vous me direz, et vous aurez bien raison, mais un peu de cohérence n'a jamais nuit à un film. Ce qui importe à Araki, c'est de montrer comment une jeune fille des années 80 (c'est Shailene) réagit face à un évènement aussi bouleversant que la disparition physique d'une mère et comment une adolescente perçoit la cellule familiale. La réponse : elle s'en fout, elle préfère s'envoyer le flic canon (enfin le flic... il lui a fallut deux ans pour capter l'identité du coupable quand même, j'espère qu'il est pas surchargé niveau travail) du comissariat du coin (enfin le comissariat... un atelier de peinture tout au plus, vous m'avez compris) et trainer avec ses potes (les deux là...). A sa psy elle raconte plus ou moins ce qu'une actrice de téléfilm raconterait à la sienne : "J'ai fait un drôle de rêve la nuit dernière, j'étais dans mon lit et je me faisais tirer par mon copain quand je me suis rendu compte qu'il avait la tête à papa, vous pensez que ça veut dire quooooiii?". Pour elle tout n'est que façade. Quand on gratte la surface, il y a encore de la surface. Le film, à ce titre, est moins lisse qu'il n'y parait.
Sa mère était autrefois une beauté comme on en voyait qu'au cinéma. Elle devait avoir tous les hommes à ses pieds mais avait épousé son lourdeau de mari, le père de Kat (c'est Shailene). Parce qu'il lui avait demandé en premier, sans doute. Pourtant lui aussi avait eu du succès à l'époque ; il rendait ses collègues féminines hystériques et enflammait le bureau. Ils formaient alors le parfait couple d'américain moyen dans le parfait quartier pavillonnaire moyen. Puis patatra. "Same old same old" comme ils disent. Le quotidien a fini par les ronger et le couple s'est progressivement délité. La rancœur s'est instillée dans les esprits des deux ex-amants (désormais papa se paluche au sous-sol pendant que maman fantasme sur sa littérature et le copain de sa fille), le silence s'est imposé et la frustration a gagné. La cellule familiale est brisée.
C'est mon premier film d'Araki et je suis déçu. Il rejoint ce mois-ci Fincher (pour Gone Girl) et, dans une moindre mesure, Dolan (pour Mommy) dans la catégorie "scénario à fort potentiel mais traité par-dessus la jambe". Vouloir parler du couple à travers le deuil et le regard d'une adolescente de 17 ans est une très bonne idée. Même si le sujet du couple pavillonnaire toute de frustration contenue et de la femme au foyer qui pète les plombs a déjà était bien était défrichée par "Desperate Housewives" et "American Beauty", il reste néanmoins intéressant à traiter d'un autre point de vue que celui des adultes et, de surcroît, d'y incorporer en filigrane une étude sur le deuil. Malheureusement tout sonne étrangement faux, tout semble fait de toc : la maison familiale profondément ennuyeuse et impersonnelle et filmée comme le décor d'une sitcom (pièce A : le sous-sol, pièce B : la cuisine, pièce C : la chambre), la réaction totalement grotesque et incrédule de Kat quant à la disparition de sa mère, l'étalage de clichés (les deux meilleurs amis, la relation avec le flic de 40 ans, la romcom avec le boy-next-door)... Mais le film à les qualités de ses défauts. Faute de mise en scène ou volonté du réalisateur, il se dégage de cet artificialité formelle et du surjeu de Green (ses apparitions sont comme fantomatiques) et de Meloni (que je n'attendais pas dans ce registre) une atmosphère angoissante et presque fantasmagorique indéniable. Pourtant on ne pourra pas ignorer les ficelles énormes de la mise en scène et la révélation finale en forme de pétard mouillé. Une fin d'ailleurs qui comporte une légère incohérence : alors qu'on y apprend (bien qu'on s'en doute quelques minutes avant) que le père est en fait un homosexuel refoulé, on a du mal à comprendre ce qu'il foutait quand, se tirant tranquillement la nouille dans sa cave, il avait un magasine pornographique hétérosexuel dans les mains... Il était en pleine de séance de frustration? Il s'auto-frustrait volontairement? Bref. Sinon Shailene Woodley est, encore une fois, convaincante dans le rôle de l'adolescente malchanceuse. C'est la quatrième fois cette année (The spectacular now, Divergente, The Fault in Our Stars et celui-ci). A ce rythme elle représentera bientôt à elle seule tout un pan de la culture mainstream d'hollywood : celui du chiale ou crève.