Ah la la... White god, ça partait bien pourtant... Une belle affiche, une série B animale tournée en vraie avec une révolte canine... Il y avait de quoi enthousiasmer n'importe quel cinéphile ! Puis on lit les détails du synopsis et on tombe sur "une loi qui interdit les croisements de race parmis les chiens"... Et ça commence à sentir bien mauvais comme la dénonciation galvaudée du nazisme des bonnes familles. On commence alors à y aller à reculons. Et ça n'a pas loupé, c'est la purge auteurisante qu'on flairait à 20 bornes.


Presque tout est mauvais dans White God. Seul le dressage des animaux laisse à penser que le boulot a correctement été fait, ainsi que l'idée de filmer tous les animaux et de se livrer à un authentique film animalier muet. Le reste oscille entre l'ennui et la lourdeur, tant ce film accumule les situations affligeantes (deus ex machina avec le petit chien qui sauve notre clébard à de bien trop nombreuses reprises), le symboles vides (le clochard qui se met à torturer le chien qu'il veut adopter), les dénonciations de comptoirs (combats de chiens, l'humain il est méchant),une technique pauvre (caméra à l'épaule qui filme parfois très mal les mouvements). C'est pathétique dans son inefficacité, car White God croit que parce qu'il adopte le point de vue d'un animal, il peut se permettre une naïveté de ton. Mais cette naïveté s'exprime toujours de façon soulignée, sans la moindre spontanéité (genre les gars de la SPA qui arrivent au ralenti avec une musique de suspense en filmant bien les collets). Babe, le cochon dans la ville réussissait à nous intégrer dans la communauté d'animaux, et quand les méchants gardes de la SPA venaient virer les squatteurs, là il y avait spontanéité et émotion. Ici, le film montre constamment du vide. A la rigueur, quand le chien montre les crocs, quelque chose passe. Mais sinon, tout le reste est incroyablement terne. Il suffit de regarder la séquence de séparation pour se rendre compte combien personne ne s'investit dans ce film : la gamine qui voit son chien se faire distancer par la voiture tente à peine d'ouvrir la portière en répétant à son père de s'arrêter, puis regarde platement le chien s'éloigner. Une larme coule, mais vu son visage, elle vient d'être déposée par la maquilleuse. White god n'est pas sincère une minute. Alors, si c'est en plus pour dénoncer le nazisme, vous parlez d'un film digne d'intérêt !


Parlons en de cette dénonciation ! La loi qui impose les critères raciaux des chiens n'est pas justifiée une seule fois (alors que c'est toujours le contexte qui permet de comprendre une loi, ici un contexte de crise économique poussé à un paroxysme) ! Une haine irrationnelle, mais c'est toujours par là que ça commence ! Alors tout le monde se met à traiter les chiens comme des boulets ! Comme certaines minoritééés ! On les abandonne dans la rue et là, des patrouilles omniprésentes les récupèrent pour les parquer dans des camps ! Ils auraient dû leur mettre des brassards rouges pour que ce soit plus clair... Et pendant ce temps, la jeune maîtresse du chien, toute gentille et contrainte de devoir abandonner son ami, doit jouer dans un orchestre contraignant avec un professeur très antipathique qui l'humilie en public en lui disant bien combien l'ordre c'est important... Pitiééééé ! Au milieu, le film fait n'importe quoi, car il faut faire de la symbolique pour qu'on croit que c'est sérieux. Ils nous foutent donc le coup du clochard nazi (le comportement du chien est complètement aberrant pendant cette scène, mais on n'est plus à ça près), l'entraînement du chien pour les combats (parce qu'un cliché facile et payant ne se refuse pas) et son évasion façon je cours sur une musique vivante, ses petits tours de passe passe avec le petit compagnon chien tout crasseux... Et enfin, la grande rébellion des chiens. On ne dira pas que les scènes où l'on voit cette horde de canidés déferler ne sont pas impressionnantes, mais elles n'ont aucune ampleur sérieuse. Ils suffit de regarder les figurants humains dans le flot, qui font semblant de tomber, d'avoir peur. Comme si vous voyiez trois chiens courir à côté de vous, alors vous renversez votre caddie de supermarché en hurlant "c'est l'anarchiiiiie !". C'est complètement illogique et vide de sens ! Et voilà que les forces spéciales de police arrivent et tirent dans la meute de chiens en mode répression sanguinaire...


Je passe sur la scène finale qui n'a absolument aucun sens (à part mettre du beaume au coeur, genre un peu de douceur peut calmer la tempête, sans la moindre nuance ou subtilité dans le sens, et d'ailleurs, c'était quoi cette tempête ? C'était quoi le message ?), pour finalement retenir le caractère absolument vague de ce film, qui ne sert finalement qu'à dénoncer la loi absurde qui crée cette situation (elle a été réellement promulgée en Hongrie en 2011, dans un contexte de crise visant à renflouer les caisses de l'Etat, les critères raciaux ont toutefois fait jaser beaucoup, les races non hongroises étant taxées, et les races "dangereuses" davantage que les autres) et qui filme ses animaux avec moins d'empathie que La belle et le clochard 2 (et j'insiste, je parle bien de la suite pourrave qu'a fait disney, qui avait au moins la sincérité du cahier des charges dans sa confrontation bourgeoisie / peuple de la rue). Un film allégorique qui peut bien remercier cette loi pour lui donner le seul contenu dénonciateur plausible (sinon, aucun lien avec le réel, on aurait aimé aussi qu'on parle des abandons massifs en Roumanie et en Ukraine qui ont suscité une recrudescence de hordes de chiens errants, suite aux abandons liés à la crise économique), avec son parti pris audacieux et ses beaux plans de chiens, bien dressés.

Voracinéphile
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le 9 oct. 2015

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