Will Hunting ou l'antithèse de Gatsby le Magnifique

Sous-côté! Voilà le premier mot qui me vient en tête quand je pense à Will Hunting. Je pourrais justifier cela en disant que, malgré l'Oscar 1998 du meilleur acteur dans un second rôle décerné à Robin Williams, le grand public ne songe pas à ce film quand il parle de ce grand acteur. Je pourrais également souligner le fait que c'est grâce à cette oeuvre que des géants du cinéma comme Matt Damon et Ben Affleck ont pu être mis sur le devant de la scène. Mais, si je disais cela, ce ne serait que faire partiellement hommage à Will Hunting. Ce serait seulement s'appuyer sur les récompenses qui ont été obtenues par ce film en occultant le plus important : son scénario. Attention spoilers!!

Tout d'abord, si ce film est magnifique et, à mes yeux, terriblement sous-côté, c'est parce que son scénario est rédigé avec brio. En racontant l'histoire d'un jeune adulte surdoué et impulsif ayant vécu une enfance difficile faite de violences et de mauvais traitements, l'erreur aurait été de tomber dans le cliché et le déjà vu. Or, c'est là que cette oeuvre est brillante parce que, malgré l'apparente simplicité du scénario, le spectateur ne ressent à aucun moment l'impression de voir un film au script dépourvu d'originalité qui serait dénué d'intérêt. Au contraire, l'idée de faire dialoguer le héros, Will Hunting (interprété par Matt Damon) avec un thérapeute venu du même milieu social que lui est très intéressante et permettra de faire avancer l'intrigue de manière assez novatrice.

Mais, surtout, plus que de la technique ou de l'écriture, je retiens l'émotion qui se dégage de ce film. Ce personnage principal terriblement intelligent, que l'on pourrait presque qualifier d'autodidacte, est terriblement attachant. Ce jeune adulte qui ressent le poids terrible de son passé difficile est, derrière la coquille qu'il s'est forgé, un homme tourmenté qui a une peur effroyable de l'abandon. Cette peur ayant pour cause les troubles vécus dans son enfance explique l'ensemble des décisions prises par ce dernier. C'est d'ailleurs pour cela que, malgré la rencontre de la femme qui semble lui correspondre à merveille, il préfèrera dans un premier temps la rejeter avant d'être abandonné. Ce comportement autodestructeur est une parfaite illustration de la phrase finale du roman de Francis Scott Fitzgerald : "Et nous luttons ainsi, barques à contre-courant, refoulés sans fin vers notre passé". Cependant, et heureusement, le remède à la fatalité prendra les traits du thérapeute, interprété avec brio par le regretté Robin Williams. Par un dialogue final intense entre le personnage principal et ce dernier, il parviendra à lui faire comprendre que tout ce qu'il a vécu "n'est pas de [sa] faute" et qu'il doit cesser de se punir pour des faits qui ne lui sont pas reprochables. A cela, il faut ajouter la forte relation amicale, quasiment fraternelle, existant entre Will Hunting et son groupe d'amis (dont on peut citer Chuckie joué par Ben Affleck). L'ensemble de ces liens permettra au personnage principal d'avancer avec plus de sérénité sur le chemin de la vie d'adulte tout en acceptant le poids de son passé difficile.

Au final, c'est peut être là que réside la force de ce film : le talent de ses acteurs principaux et secondaires, la qualité d'écriture de son scénario, l'émotion qui se dégage de son intrigue. Tous ces éléments mis bout à bout font de Will Hunting un film splendide qui devrait être bien plus connu et surtout reconnu par le grand public pour sa qualité. Cette critique aura, je l'espère, permis de lui rendre hommage tout en donnant envie à davantage de personnes de connaître cette œuvre.