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Wolf Man
5.4
Wolf Man

Film de Leigh Whannell (2025)

Il n’y a que les « véritables » cinéphiles qui s’en souviennent, mais il y a cinq ans, Leigh Whannel nous offrait une réussite mémorable avec son Invisible Man, remarquable réécriture de l’histoire de l’homme invisible en l’enrichissant d’une étude quasi clinique de la perversion narcissique. On a mentionné les cinéphiles parce que le public ne se déplaça pas pour voir un film qui était proche du chef d’œuvre, et qui ne fut sans doute pas assez défendu par la critique « officielle », toujours un peu effrayée par les mélanges audacieux de genres.

L’annonce d’un Wolf Man du même auteur nous a immédiatement excités : on salivait à l’avance à l’idée d’une approche similaire, appliquée au mythe du loup garou (qui, à la différence de celui du vampire, a peu été renouvelé au cinéma…). L’immense Elisabeth Moss était remplacée pour le coup par une Julia Garner beaucoup moins célèbre, mais qui nous avait impressionnés dans Ozark, le budget du film était bien plus réduit mais pas absurde pour une production Blumhouse… bref les signaux étaient au vert…

Wolf Man est un film très concentré, ce qui n’est pas pour nous déplaire : unité de lieu, de temps et d’action, suivant les inusables principes de la bonne tragédie. Et Whannel n’y va pas avec le dos de la cuillère : quand l’action démarre, au bout d’une demi-heure environ, elle ne s’arrête plus jusqu’au dernier plan. Wolf Man ne nous ménage pas avec son mélange gore de violence bestiale et de body horror (l’ombre de la Mouche de Cronenberg plane vaguement). Au cours de la séance à laquelle nous assistions, plusieurs personnes ont quitté la salle : ce qui quelque part, indique que le contrat « horrifique » établi avec Blumhouse est rempli.

Le problème est que nos attentes à nous ne sont pas réellement satisfaites : bien réalisé, tendu, haletant, le thriller horrifique qu’est Wolf Man confirme le talent de metteur en scène de Whannel, mais le spectateur plus exigeant reste sur sa faim. Le sujet « psychologique » - ici la transmission de la violence de père en fils – n'est pas stupide : on saisit bien où cette histoire d’un retour à la cabane familiale – située dans le fond des forêts du Montana –, qui permet de réaliser qu’on ne se débarrasse pas facilement de la malédiction de la violence masculine (se retournant, comme toujours, contre les membres féminins de la famille), veut en venir. Protéger sa famille, oui, mais comment la protéger de la violence qu’on porte en soi ? Malin, oui, mais trop léger, et ne débouchant sur rien d’autre que des évidences.

Même chose pour le renouvellement du thème du loup-garou : il y a certes ici un dépouillement – bienvenu – de la plus grande partie d’un mythe assez ringard, mais il n'y a pas cette transcendance que l'on espère dans la modernisation, dans l'actualisation d'un tel thème. On s’en tient au concept d’une vague contamination – dont la source est plutôt confuse – et à une dégénérescence physique du contaminé assez peu surprenante. La seule vraie bonne idée du scénario et de la mise en scène est de nous faire passer de la perception du monde par les « humains » (la mère et la fille) à celle du « contaminé » (le père) : c’est simple, efficace, bien exécuté, et ça nous rassure un peu sur la capacité de Whannel de rebondir avec un film plus réussi.

Dernière remarque : on sort de Wolf Man relativement déçu par la performance de Julia Garner, qui n’arrive pas à habiter son personnage de jeune mère déchirée entre son amour pour son mari (un amour clairement de moins en moins fort) et la nécessité de survivre et de protéger sa fille. Problème de direction d’acteurs ? Ou d’écriture d’un personnage qui n’a finalement que peu de choses intéressantes à dire ou à faire ?

Wolf Man est loin d’être un mauvais film, mais on attendait beaucoup plus ambitieux et beaucoup mieux de Leigh Whannel. La prochaine fois ?

[Critique écrite en 2025]


https://www.benzinemag.net/2025/01/20/wolf-man-de-leigh-wannel-la-violence-du-pere/

EricDebarnot
6
Écrit par

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il y a 4 jours

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Eric BBYoda

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