Halla est une quinqua accomplie et appréciée, célibataire, sportive, elle dirige une chorale. De prime abord, rien de bien exceptionnel. Mais Halla est aussi une femme en colère qui s'insurge de la surproduction d'aluminium de son pays tendant à mettre en péril l'environnement. Seule (rares sont ses complices), armée de son arc, harnachée et équipée comme un warrior, elle mène des actions fortes qui vont crescendo. Le pot de fer contre le pot de tourbe ?


On pourrait préjuger d'un énième pensum qui se prend la tête sur le sujet, militant à souhait, dogmatique à saouler. Il n'en est absolument rien ! Benedikt Erlingsson, le réalisateur, choisit au contraire la voie décalée du récit à l'ancien, la fabliau qui sous sa facétieuse apparence cache une morale nettement plus grave, voire ambiguë.


Avant tout il aime son personnage d'Halla, non seulement pour ce qu'elle défend (agir avant qu'il ne soit définitivement trop tard) mais ce qu'elle est. Il aime tout aussi fort son pays et ses paysages foisonnants de couleurs chaudes. Halla et son combat font qu'elle évolue dans une presque totale schizophrénie entre la femme de tous les jours dont l'intérieur de la maison ressemble paradoxalement à un véritable catalogue tendance d'électro-ménager et la baroudeuse capable de se camoufler en peau de bête. Entre la future maman (adoption) dont on la sent prompte à céder aux futurs caprices de la progéniture et cette militante que rien ne semble impressionner. Cela engendre bien sur cocasserie, mais aussi une profonde tristesse comme chez un autre héros de légende qu'est Don Quichotte !


"A woman at war" sous la magnificience de ses paysages (on comprend à 100% l'impérieuse nécessité de les préserver), sous cette bonhomie parfois très légère (les musiciens véritables "anges annonciateurs" ponctuant in situ dans le décor progression ou désillusion), du clément portrait dressé à son Artemis… le film est tout sauf léger, tout au contraire il est âpre et dur jusqu'à ce final soulignant que la cause même de la lutte semble presque déjà bien obsolète.


Il y a un côté licencieux d'ailleurs dans ce film qui cherche à réveiller les consciences. L'état de guerre civile y est omniprésent (attentat contre le bien public, le fin du drone achevé comme une bête, nouvelle technologie au service des armes …). Est-ce à dire que pour qu'un individu se fasse entendre contre la société, la seule possibilité d'agir est le conflit ouvert ? Benedikt Erlingsson modère toutefois son propos. La violence est une chose, l'humain une autre. La résilience passe par l'espoir des générations à venir. Et comme bien des récits ou contes, l'adulte pour expier les fautes du monde, finit toujours par porter l'enfant pour traverser le cour d'eau sauvage.


Véritable porteur d'histoire et loin de tout factum Benedikt Erlingsson apporte une variation subtile et fraîche de l'incrimination. On sourie autant que l'on s'émerveille, on se cabre pour mieux abandonner l'instant d'après, on s'interroge autant que l'on s'agace. Bref le film est vivant et plaisant. Cette jovialité cinématographique révèle non seulement une pensée positive mais a beaucoup plus de chance de rallier un public à sa cause que certains docs parfois indigestes.


"A woman at war" est donc un film original à voir, ne serait-ce que pour provoquer le débat, mais surtout pour une Halldóra Geirharðsdóttir qui le porte avec conviction et force sur ses épaules.


Trailer avec en fond musical un extrait de la partition de Davíð Þór Jónsson

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le 9 juil. 2018

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Fritz Langueur

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