Woody Allen est probablement l'un des cinéastes que j'apprécie le plus. Pourquoi donc ? Il faut avouer que j'ai un attrait particulier pour son cinéma, son écriture et sa mise en scène tout à fait remarquable - qui peut certes sembler simple au premier abord mais est en réalité bien plus complexe qu'il n'y paraît.
Ici, dans son dernier long-métrage Wonder Wheel, Woody Allen nous entraîne à nouveau dans les méandres d'un réseau (voire un jeu) de relations passionnant, le tout saupoudré de cynisme et d'ironie profonde.
Si le réalisateur nous livre son éternel - sempiternel pour certains - triangle amoureux, il n'en est pas moins savoureux et vous frappera autant que peut vous frapper un Match Point. Le film dans lequel nous plongeons nous offre des décors magnifiques d'un univers marqué par les années 50 et la fête foraine de Coney Island, ainsi que des dialogues parfaitement écrits et frappants. Je ne peux bien entendu pas oublier la photographie de Vittorio Storaro qui est sublime et extrêmement travaillée, chaque personnage possède sa propre couleur symbolisant ce qu'il est, ce qu'il ressent, ainsi qu'un lieu qui lui est associé. Et si le théâtre, la dramaturgie, et la destinée sont des thématiques au coeur du film en plus d'être métadiscursive, Woody Allen nous dit clairement que son oeuvre n'est ni un simple film, ni une simple pièce de théâtre, mais un jeu perpétuel oscillant de l'un à l'autre.
Je ne peux sincèrement pas comprendre les critiques reprochant à Woody Allen de se reposer sur ses acquis et que sa mise en scène est trop théâtrale. Avons-nous réellement vu le même film ? Le travail sur les couleurs ? Le travail sur la caméra ? Sur les plans séquences ? Sur le plan séquence final ?
Ajoutez à cela la direction d'acteurs renversante que nous offre Woody Allen - comme à son habitude. Une Kate Winslet en artiste déchue, lunatique et désespérée ; une Juno Temple juste, innocente, et décidément des plus charmantes ; un Justin Timberlake brillant, nous immergeant en brisant le quatrième mur et en nous prenant à témoin de la tragédie, de ces tristes et mélancoliques portraits, peuplant la vaste foule des allées de la fête foraine, sous la splendeur d'un ciel ensoleillé et coloré. Une ambiance hors du temps, commençant en Rohmer pour se conclure en Tennessee Williams.
Wonder Wheel est un très bon Woody Allen, peut-être pas le meilleur, mais qui m'a personnellement fait passer un excellent moment de la première seconde à la dernière .
"Nous avons tous quelque chose de Tennessee Williams..."
Aleas, humble passant sous l'immense tour de Coney Island.