Vous vous rappelez de World War Z? En 2006, Max Brooks a publié un des meilleurs romans de science-fiction post-apocalyptique jamais écrit. Ce new-yorkais nous faisait alors cadeau d'un livre contenant les témoignages fictifs de quelques dizaines de survivants. Le héros, anonyme, partait en mission pour l'ONU autour du monde et recueillait les souvenirs, les ressentis et les regrets des hommes et des femmes ayant survécu à l'effroyable guerre des zombies, une guerre que l'humanité a bien failli perdre et qui a laissé le monde agonisant. En 516 pages se succédaient des témoignages tous plus poignants les uns que les autres de civils, de scientifiques, de soldats, d'hommes d'états, d'artistes, de gens comme vous et moi, qui racontaient leur histoire personnelle et dépeignaient toute l'horreur et la déchirure qu'ont été les années où la peste zombie s'est muée en pandémie, ravageant la Terre et amenant notre espèce au bord de l'extinction.

Alors quand j'apprends que Marc Forster va réaliser l'adaptation cinématographique de cet excellent roman, avec Brad Pitt dans le rôle principal, forcément, je sautille de joie et je salive de quoi remplir une baignoire.

Et quand j'apprends qu'en 2009, le scénario a dû être entièrement réécrit, que les problèmes de tournage s'accumulent et que le film va prendre du retard, je soulève un sourcil.

Et enfin, quand je sors du cinéma en juillet dernier, je me retourne, je prends une grande inspiration, et je vocifère: "MAIS QU'EST-CE QUE C'EST QUE CETTE MERDE!"

Parce que voyez-vous, je suis très déçu. Je pensais voir une adaptation du roman qui donne son titre au long-métrage et un bon film de zombie, j'ai vu tout autre chose.

Ça commence avec Bradounet, aka Gerry Lane, qui se fait réveiller par ses gosses dans la chambre familiale. Deux minutes plus tard, la petite famille est coincée dans les embouteillages new-yorkais, quand VLAN, les sauterelles débarquent. Attendez, quoi? Ben oui, désolé mais c'est pourtant ça. En quelques minutes, une horde de créatures féroces envahissent toute la ville, mordant à qui mieux mieux, défonçant tout sur leur passage. L'indétrônable Brad réussit néanmoins à tataner quelques assaillants et à monter au sommet d'un immeuble où il sera récupéré in extremis par un hélico du gouvernement qui a fait le voyage exprès pour le récupérer lui tout seul, que c'est sympa de sa part.
Et là, alors que vingt minutes de film se sont à peine écoulées, je dis stop, premier gros problème. Où sont les zombies de World War Z, le bouquin? Je rappelle que les monstres qui emplissent le roman de Max Brooks sont des cadavres réanimés au cerveau complètement saturé du virus "zombifiant", qui ne connaissent ni faim, ni fatigue, ni douleur, ni aucun raisonnement humain, ne sachant que tituber aléatoirement jusqu'à ce qu'ils repèrent un humain bien frais, qu'ils vont alors essayer de dévorer.

Dans World War Z, le film, il n'y a que des humains normaux qui, à peine mordus, se transforment en quelques secondes (oui oui) en créatures folles furieuses a la peau veinée de noir, et se mettent alors a tout dévorer dans le périmètre, et surtout à courir à une vitesse absolument hallucinante. Imaginez une horde de clones Usain Bolt gavé d'un cocktail amphé-GHB-ecstasy avec un appétit démesuré. Vous l'avez? Eh bien, c'est ce qu'on nous sert en lieu et place des morts-vivants de l'œuvre originale.

Mais passons. Une fois déposé sur le porte-avion (America, fuck yeah!), on nous explique qu'un super-virus vient de nous tomber dessus sans crier gare, que toute la planète part en couilles sévèrement, et que Gerry Lane, obscur fonctionnaire des Nations-Unies, doit se bouger le train pour trouver d'où vient l'épidémie et y remédier afin de sauver les USA, pardon, je veux dire le monde.

OK.

Ainsi donc, le film nous balade sur une base militaire coréenne, puis en Israël (je tiens à signaler la présence d'un laïus ronflant et franchement limite sur Israël, la-patrie-des-opprimés-qui-résistait-hier-contre-les-affreux-oppresseurs-et-aujourd'hui-contre-les-zombies), dans une Jérusalem assiégée ceinte par des remparts (attention, spoil a venir) qui seront tout simplement escaladés par les zombies parce qu'un groupe de réfugiés a fait la connerie de chanter trop fort de l'autre côté, ce qui attire les bestioles à proximité.

Le brave Bradinou survit -seul, parce qu'il est invincible- au crash d'un avion de ligne pour se retrouver dans un laboratoire infesté de créatures où il va finalement trouver -seul, parce qu'il est méga trop fort- le remède miraculeux contre la pandémie en s'inoculant une saloperie dans les veines, et conclure sur un happy end où il retrouve sa petite famille.


Voilà, rideau.

Alors, qu'est-ce qui ne va pas? Eh bien, presque tout (j'ai dit presque), à commencer par ces espèce d'antilopes défoncées au crack qu'on nous sert à la place des zombies du livre, qui ne sont pas crédibles pour un sou et qui n'inspirent pas franchement de peur ni de terreur, juste une grosse envie de leur mettre des claques. Ensuite l'histoire, qui ne correspond absolument pas au bouquin non plus.
Alors oui, je comprends bien qu'on ne pouvait pas filmer au pied de la lettre ce roman et qu'une adaptation se doit de prendre quelques libertés, mais il y a un juste milieu qu'on ne trouve pas ici. Au lieu d'un tour du monde dépeignant l'apocalypse zombie, on a droit à une courte tournée des pays à la botte des USA et a une intrigue fadasse qu'on flaire dès qu'on nous présente le problème, sur le porte-avion américain.
Et le héros? Anonyme dans le livre, Gerry Lane est plus un faire-valoir qu'autre chose. Excuse-moi Brad, pourtant je t'ai adoré dans Fight Club, Ocean's Eleven et Inglorious Basterds, mais dans World War Z tu n'as pas franchement l'air de savoir ce que tu fous là.
Les scènes s'enchaînent trop vite pour qu'on s'attache aux lieux visités, le début beaucoup trop rapide et la fin longuette (avec en plus une espèce de pub mal déguisée pour Pepsi, allez comprendre), et on nous jette les zombies à la figure au moindre prétexte.

Qu'est-ce qui va? Les effets spéciaux pas trop crades et le relatif sentiment d'urgence dans la quête du héros qui est assez bien ressenti.


Alors de deux choses l'une: soit vous n'avez pas lu le bouquin et vous irez voir un film moyen, assez plaisant à regarder si vous êtes bon public et amateur de Brad Pitt.

Soit vous avez lu World War Z, et vous allez avoir envie de pleurer devant un tel gâchis qui ne respecte ni l'histoire, ni le héros, encore moins les monstres (surtout ça, ai-je envie de dire, parce que c'est ce qui fait le plus tache) du livre original, et qui ne parvient pas une seule seconde à toucher au cœur le spectateur comme le roman avait su le faire avec une ampleur inégalée.

Max Brooks, si je te croise dans une ruelle un de ces quatre, sache que je sais faire des trucs rigolos avec une batte cloutée.
VlocipdeAquatiq
2
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le 18 sept. 2013

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