C'est toute la détermination de Djamila Sahraoui qui imprègne Yema, tragédie familiale austère et mutique. Auteure, réalisatrice et interprète principale de son film, elle est bloc imperturbable, femme entêtée qui fait plier son monde.
Il est question d'un fils officier mort, d'un autre, rebelle, en disgrâce, d'un jeune gardien maladroit, d'un potager à faire prospérer. La mère vit seule dans une bâtisse isolée en pleine montagne. Elle ne se plie que contrainte et forcée, mais garde la tête haute, le regard droit, fière et obstinée. Femme dure qui ne pardonne pas, qui ne laisse rien passer, mère universelle de tragédie, elle est figure d'un jugement quasi divin, qui connaît la souffrance, qui sait le bien, qui sait le mal.
Yema est un film radical, ni séduisant ni aimable. On comprend la volonté de la réalisatrice de ne faire ni dans le pathos, ni dans le pittoresque, mais à force de peindre des émotions rentrées, des relations humaines aussi brutales qu'intransigeantes, Djamila Sahraoui prend le risque de laisser le spectateur au bord du chemin. Quasiment dénué d'émotions, filmé a minima dans de très beaux décors, trop théâtral parfois, le film ne parvient jamais à captiver réellement.
Dans sa volonté farouche de transcender les souffrances d'un pays, par le prisme d'une fiction catharsistique, Yema n'en demeure pas moins sincère et légitime.