Tu me connais, j'adore les slashers. Cependant, il faut bien reconnaître que ce genre moribond, tellement cliché et caricatural, surexploité, sur-rebooté, souvent confié à des yes-men sans ambition artistique aucune, à destination d'ados s'ennuyant pendant les vacances d'été et cherchant un endroit climatisé et sombre pour se galocher, n'est jamais vraiment sorti du marasme de la fin des 80s. Pire, l'électrochoc du meta Scream de Craven, jouant de tous les codes du genre et les dynamitant, a généré plus de dégâts (Urban Legend, I know What You Did...) qu'un réel renouveau. Ajoute à ça les reboots en pagaille et nous voici dans un contexte pas vraiment favorable pour un genre déjà caricatural dans son ADN.
Et parfois émerge de ce marasme une petite pépite. Et You're Next aurait pu en être une, mais ce n'est pas le cas (bah oui, hein, tu t'es précipité sur la note, donc tu sais...). Et ça m'énerve, car le titre avait vraiment du potentiel.
Bon, je ne vais pas te refaire le pitch, il est marqué juste au-dessus. Et puis, si tu lis ces lignes, c'est que tu as vu le film, car si ce n'est pas le cas, arrête tout de suite, parce que 1/ je vais SPOILER à mort, et 2/ on a pas idée de lire la critique d'un film qu'on a pas vu!
Donc, oui, You're Next rate le coche. Ca commence pourtant bien: une intro assez musclée, avec de la tension. Un petit massacre, bien mis en scène, avec un boogeyman qui connait ses classiques: arme blanche (la Jason Voorhees Trademark Machete) et masque vraiment spooky. Et tu sais combien j'attache de l'importance à la tenue du boogeyman dans un slasher: elle doit être banale, mélange de Jardiland et du magasin d'articles de fêtes "Au Bal Masqué" (décalécatan, décalécatan-ohé-ohé); et pourtant iconique et terrifiante.
Rappelle-toi le masque de Michael Myers: ce n'est qu'un masque de William Shatner, à l'origine.
Une scène qui donne le ton: elle reprend complètement les clichés du slasher-movie (assassinat d'un couple post-coït à l'arme blanche, déjà vu dans à peu près chaque Friday), mais avec quelques idées de mise en scène brillantes: le gimmick du CD qui boucle, par exemple, qui n'est pas sans rappeler cette fameuse scène de la série Twin Peaks.
Bref, ça commence réellement bien; du classique, de très bonne facture.
Puis viennent les obligatoires plans de construction d'intrigue: la famillle riche, dysfonctionnelle, qui se retrouve pour l'anniversaire de mariage des parents, avec la fratrie de 3 frères et une soeur, chacun venant avec sa pièce rapportée. Tous se retrouvent dans la maison de campagne familiale, grande et isolée comme il se doit.
Après une très brève exposition des personnages, arrive le diner familial, qui cristallise toutes les tensions de cette famille: engueulades à tout va...
Le film switche alors dans le home invasion, quand on réalise que notre boogeyman est en fait UNE équipe de mecs masqués, avec une variété que ne renierait pas Hotline Miami: mouton, loup, poulet... Le parallèle avec The Purge, sorti à peu près simultanément, est inévitable.
Très vite, le film évacue les enjeux; tout est TRES vite expliqué-et expédié: le plan organisé par le frangin geek discret et sa méchante twisted girlfriend (lourdement illustrée dans une scène) pour une simple histoire d'héritage.
Pire: on voit très vite le visage de notre équipe de massacreurs, une bande de militaires bras cassés bas du front, désamorçant immédiatement la terreur qu'ils dégageaient.
C'est d'autant plus dommage que le personnage d'Erin, sorte de Lara Croft survivaliste, est assez jouissif et rafraîchissant (même si le background du perso sensé illustrer ses connaissances est assez pathétique). Et que la spatialisation est assez bien gérée, chose vraiment primordiale dans un home invasion movie.
Je ne parle même pas du twist final, qu'on voit arriver à mille kilomètres à la ronde pour quiconque rompu à l'exercice du slasher à twist.