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Bordeaux, 2016, novembre se termine. Lentement, le bougre. Les angoisses se bousculent, comme les couches de vêtements sur moi. Au fur et à mesure le moral déserte, tandis que descendent les degrés sur le thermomètre et la popularité de François Hollande sur la courbe des sondages. Novembre se termine, et c'est très bien.


Ma blonde et moi (tiens, on dirait un titre de film québécois) nous rendons à l'avant première du film dont je m'apprête à parler. On a de la chance, arrivés presque une heure avant, nous avons pu nous installer sans encombre dans une (petite) salle de l'UGC. Petite, au vu du nombre de gens venus à cette occasion... Quelques minutes avant le top départ de la bobine, la salle est bourrée de chez bourrée, au moins autant si ça se trouve que le programmateur en charge de ce cinéma.


Il paraît qu'à chaque fois qu'une curiosité nippone débarque en avant-première, le cinéma prévoit une salle trop petite pour l'auditoire à venir. C'est ce que me soufflent alors autour de moi les âmes mieux informés. Moi, je n'en sais rien. Et je n'en sais rien car je suis un ignare notoire en cinéma nippon, animés, films et œuvres du dit pays. Voilà c'est dit.


J'ai parlé de ma blonde. Une idée d'elle, d'aller voir ce film. Grâce lui en soit rendu. 107 minutes plus tard, moins ignare, l'esprit léger, plus amoureux et moins enclin à flipper de ce triste mois de novembre, je balbutie des mots sans originalité sur le trottoir bordelais : " Vraiment bien ".


Ce film c'est : des choix, du travail, beaucoup de travail, et du paradoxe temporel. Nom de Zeus !


D'abord, des choix, dont un, celui de la lenteur et de la beauté. Dans le film, le dessin et l'animation débouchent souvent sur des cadres larges, paysages contemplatifs à souhait, beaux en diable. Le quotidien des protagonistes (deux inconnus s'échangent lorsqu'ils rêvent leurs quotidiens et interagissent dans celui de l'autre) et sa répétitivité sont donnés avec juste ce qu'il faut de temporisation, d'humour et de couleur. C'est beau, très beau, mais aussi drôle, terriblement drôle. Drôle quant le gars, urbain type, se trouve plongé dans une vie d'ado japonaise à la campagne, et vice-versa.


Un exemple : le gag récurrent du pelotage des seins que Taki fait lorsqu'il se retrouve dans le corps de Mitsuha fonctionne dans la récurrence, comme un excellent running gag. Pourquoi ? Parce que loin d'être une vulgaire blague d'ado beauf (rrrrrr, si j'avais un corps de meuf, comme je les palperais mes boobs, rrrrrr) ce gag en humour de répétition est désamorcé par l'ajout presque chirurgical à l'écriture des interventions de la petite sœur quand elle l'interrompt. Beau, et bien écrit, donc.


Ensuite, du travail, beaucoup semble t'il. L'animation est à tombé par terre. A la beauté des paysages et des cadres larges succèdent des plans conçus comme des bijoux de précision. Le dessin rend la caméra (fictive) virtuose. Remarquez on peut dire ça de bien des Miyazaki, mais je vous rappelle qu'il s'agit d'un avis subjectif d'un ignare autoproclamé en la matière.


Et enfin du paradoxe temporel. Ici, on s'échange des vies, des rêves, on rencontre une inconnue trois ans en arrière, on oublie son nom, mais on a l'impression que ses pas hantent les vôtres... On ne décroche jamais, bel exploit quand on sait à quel point les histoires où l'on remue le fil du temps provoquent le décrochage par manque de cohérence.


Bref. C'est beau. C'est drôle. Ça se permet d'être lent parfois presque trop, mais le presque fait tout. C'est touchant. Vraiment. C'est la première fois que j'adhère autant à un produit culturel japonais depuis Pokémon et les makis à l'avocat. Chapeau.

Farfadet_Del_Pr
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le 12 déc. 2016

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David Cathala

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