Coup de cœur de la rentrée (20 sept. au Caméo, Metz)
Fred et Mick, deux vieux amis, sont en vacances dans un hôtel au pied des Alpes. Fred, un compositeur et chef d'orchestre, est maintenant à la retraite. Mick, un réalisateur et scénariste, est toujours dans l'exercice de son art. Ils regardent avec curiosité et tendresse leur vie passée. D'un côté, Fred n'a aucune intention de reprendre sa carrière musicale. D'un autre, Mick espère aboutir à son projet cinématographique. Ces deux vieux compères vont se retrouver, s'aimer, se taquiner et surtout respirer, enfin.
Harvey Keitel et Michael Caine forment un duo extrêmement complice. Harvey.K m'a depuis peu intéressée dans Holy Smoke (1999) que je voulais voir en premier lieu pour Kate Winslet. Bref, Harvey a quelque chose en plus qui le rend beau au-delà de ses traits physiques et plus encore dans ce film subtil et nostalgique aux répliques d'une plume riche.
Le maestro et ses vaches, le personnage d'Hitler (Paul Dano) d'une représentation théâtrale digne d'un film burlesque muet, au milieu de tous ces vieux en peignoirs piquant une crise, ces paysages, ces souvenirs, ces générations révèlent la touche de sensibilité dans ce long-métrage. Je rajoute que le duo Michael Caine et Rachel Weisz (père/fille) était en adéquation avec la génération dans le rang devant moi constitué d'une jeune fille et de ses parents.
Concernant la mise en scène, nous avons l'impression, dans leur évasion de luxe, d'un travail à la chaîne (employés, soins, clients en file indienne et surtout Michael.C suivant son programme imposé par sa fille) démontrant la routine de ses résidents comme la beauté de corps jeunes (Miss Univers, Paul Dano, Rachel.W ) et vieux ("apathie" dite de Michael.C, Harvey.K) en cohabitation permanente. Je précise que je n'éprouve pas du tout, durant certaines scènes, un malaise face aux corps totalement nus des personnages. L'image émettrice de sens, peut ici renvoyer à un photographe en particulier quand celui décide d'ancrer le défilement du temps sur son corps. Le résultat est effet d'ignorance, de distance du spectateur comme d'un sentiment de plénitude de s'assumer.
Néanmoins, le cinéaste s'envole vite dans la démesure. Le suicide de Harvey.K, le non-décès de Mélanie (femme de Michael.C) et la plantureuse Miss Univers; n'étaient pas nécessaires au film. L'état mental de Mélanie n'était pas utile pour qu'il puisse faire son deuil et lui rendre hommage dans sa représentation finale.
Ccl :
-Très bons acteurs
-Bon scénario parfois "jouissif" (échanges et multiples paris de Caine/Keitel)
-Bonne BO (scène marquante d'ouverture avec "You've got the love" + angle de caméra l'accompagnant)
-Quelques défauts (Miss Univers, Mélanie, suicide, mise en retrait et idylle maladroitement exploitée de Rachel.W...)
Ce film sous un angle singulier, fait office d'humour noir d'un œil compatissant et amusé du spectateur pour ces vieux fracassés encore jeunes face au temps qui passe. La mise en compétition au Festival de Cannes 2015 aura permis une mise en lumière nécessaire afin de ne pas passer à côté de cette poétique cynique et bouleversante, tout simplement.