Son nom, il le signe à la pointe du Daisho, d'un Z qui veut dire Zatoïchiiiiii

Le Japon d'avant Nintendo était un pays dur où les criminels-organisés-tatoués rançonnaient la veuve et les orphelins. Dans un bled avec une auberge, et justement une veuve et deux orphelins, arrivent deux samouraïs sans maître, des déshonorés Ronins. L'un est avec les méchants, il est jeune, beau et triste. L'autre avec les gentils, il est vieux, aveugle et rigolard. Tous deux parlent peu et tranchent beaucoup.

Zatoïchi est un étonnant mélange de genres. A une base classique à l'ancienne mode (film de sabre asiatique, avec des combats joliment chorégraphiés, un scénario Western, des bandits, un héros solitaire peu loquace, de l'intimidation de saloon, une gentille veuve, de l'humour loufoque et un sidekick comique mettant en valeur le héros) Kitano mêle un drame franchement moderne avec pédophilie traumatique à la mode, ponctué par de la musique de percussions/claquettes new age dans des intermèdes étonnants et entraînants.

Modernité aussi dans le décalage qu'adopte Kitano sur son sujet. Notamment, le traitement de l'aveugle Zatoïchi, mythe cinématographique nippon joué par Kitano lui-même : d'abord, bien que personnage principal, ce n'est pas un héros (il n'est jamais le moteur scénaristique et se contente de suivre ce qui se passe). Ensuite, Zatoïchi, aveugle, est de ce fait plus perceptif au monde qui l'entoure qu'un voyant trompé par le sens simplificateur qu'est la vue. Kitano pousse ce principe Zen jusqu'à l'absurde dans des prouesses de samouraï cabotin qui vont crescendo. Doté de cette dextérité de dessin animé, Zatoïchi est invincible mais garde l'intérêt du public avec des combats très brefs et particulièrement intenses. Kitano est ironique, mais pas trop.

Zatoïchi n'est donc ni une modernisation branchée du film de sabre, ni un hommage référencé à un genre que n'apprécient plus que les amateurs de série B fréquentant les cinémathèques.
Il tient plus du mélange, qui prend plutôt bien grâce à la réalisation du décidément étonnant et touche-à-tout Kitano. L'habitué du cinéaste ne manquera pas d'être surpris par le continuel hétéroclisme du réalisateur de Dolls, Hana-bi ou Kid's return, tout en retrouvant ses petites marques habituelles : des scènes d'art qui se prolongent (la danse de Geisha, les intermèdes musicaux), un talent de peintre dans la mise en scène et les couleurs (ah ! le travelling arrière après le combat, entre les corps jonchant le sol gris tandis que la pluie torrentielle dilue le sang rouge) et bien sûr des Yakusas (qui ici, ne s'appellent pas encore comme ça).

Reste, pour terminer, la musique très agréable du film, qui se termine dans un bal général de claquettes modernes en tongs blindés, spectacle totalement anachronique et immensément jubilatoire avec participation des acteurs du film...

Un plaisir pour les yeux, les oreilles et les zygomatiques.
Khaali
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le 13 oct. 2010

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Khaali

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