ZDT n'est assurément pas un film tous publics, bien que - hélas - Jessica Chastain demeure très pudique de bout en bout.
C'est un film d'espionnage moderne, loin des exploits et gadgets improbables de Deubeulziro et autres OSS 117. Ici, le personnage central n'est d'ailleurs pas un officier de terrain, mais une analyste, qui mène une enquête de longue haleine pour remonter la piste de Ben Laden.
SPOILER: il meurt à la fin.
Peu de moments de bravoure, sinon la mission d'élimination de Ben Laden dans son refuge pakistanais. L'essentiel tient dans la présentation réaliste d'une mission de renseignement du point de vue de l'exploitation (caste injustement boudée par les auteurs de fiction). C'est donc lent, c'est donc frustrant, mais les curieux et les amateurs prendront plaisir à découvrir un espionnage moderne, mais parfois aussi improvisé, à base de planques interminables, d'épluchage de fadettes et de correspondances par mail. Mais, pour pouvoir en profiter pleinement, de ce film, il faut avoir accepté préalablement que c'est réaliste, que le spectaculaire n'y aura pas sa place et que ça ressemblera vraisemblablement plus à un thriller qu'à un film d'aventures-action, et il faut bien reconnaître que ce n'est pas du goût de tout le monde, et James Bond a contribué à propager une vision assez fantasmée de cet univers.
Bigelow se montre, comme d'hab', efficace dans la forme, même si l'assaut sur le BenLadenBunker aurait pu être mieux monté - en la matière, je considère toujours la chute du Faucon Noir (quelle blague, ce titre!) comme ce qui s'est fait de mieux jusqu'à présent. Moins épique et in-your-face que sur Démineurs, elle sait néanmoins montrer ce qu'il faut pour rendre l'histoire attrayante, malgré des ellipses malcommodes. Elle se fait plus neutre, et on ne peut pas dire que Chastain se signale par un jeu remarquable: tout est fait pour laisser place à l'intrigue, et seulement l'intrigue. Et, si je dois dénoncer, dans ce film, une faiblesse, c'est celle d'avoir choisi de se laisser emprisonner dans des faits réels plutôt que d'élaborer une fiction, quitte à rappeler quelque chose, de loin. Je conçois qu'un tel événement puisse être galvanisant pour des Américains, mais c'est sans doute une médaille en chocolat (vraisemblablement malade, relié au reste du monde par un simple agent de liaison, Ben Laden n'était plus en mesure de commander Al Qaïda dont il avait peut-être transmis les rênes au "bon docteur" Zarqawi).
Ceci pris en compte, et malgré toute son efficacité formelle et le soin apporté à la présentation des entrailles de la CIA d'aujourd'hui, le film perd ainsi en portée: peu d'enjeux dramatiques (on connaît le dénouement), et, en étant un peu meta, ces enjeux-là tombent un peu à plat. Reste une excitante reconstitution, pour ceux qui n'ont pas pu voir le documentaire qui, de toutes façons, n'a jamais existé.