Qu’attendre d’autre du cinéma d’animation qu’une pâmoison face à l’esthétique du vectoriel ? De solides valeurs, carburant d’un ressourcement pour le public adulte. L’univers barriolé de Zootopie, quadrillé par des biotopes radicalement incompatibles dont la traversée assurera l’ampleur de l’aventure (monde de glace, jungle sauvage… les jeux vidéo inspirent), s’agrémente d’un regard en kaléidoscope sur l’urbanisme moderne. La cité-reine, avatar de tous les idéalismes, prend soin d’incarner nos catégories moulées d’humain dans leur équivalent animalier. Les fonctionnaires, des paresseux (le mammifère), remplissent leurs tâches avec la vélocité d’un escargot. Les cadres de bureau, des souriceaux interchangeables, achètent à prix d’or un bâton glacé pour l’avaler aussitôt, tombent dans le panneau roublard d’un renard cupide sans se soucier de la dépense.
La mesure du récit – une enquête à tiroirs en marge de la loi – est battue par le pied tendre d’une lapine-épine dans celui des gros bonnets, ancrés dans le déroulement imparfait mais routinier de la machinerie-mégalopole. Elle veut tout faire imploser – les communautés segmentées, les corps de métier genrés, les raccourcis qui cataloguent. Dynamique, Zootopie catapulte ses rêveries ravalées, d’un coup de patte au cul, droit vers une tolérance plus rationnelle. Comme si les centenaires Corbeau et Renard, loin de toute morale infantilisante, avaient partagé le fromage fifty-fifty.