Si tu veux faire la paix avec ton ennemi, travail avec ton ennemi et il devient ton partenaire.
Pour son quatrième film, le réalisateur Français Jérôme Salle à qui l'on doit entre autres Anthony Zimmer et Largo Winch frappe fort avec l'adaptation du roman du français Caryl Férey pour lequel il a eu une multitude de prix et de récompense littéraire : "Zulu". Je n'irai pas par quatre chemins, j'ai adoré (c'est un moindre mot) le roman et j'ai trouvé son adaptation tout aussi excellente, une grande oeuvre française (c'est bon j'ai placé 4 fois le mot français dans ma critique).
Avant d'aller plus loin, il est primordial de savoir et de comprendre que cette histoire aussi hallucinante qu'elle puisse paraître est tirée d'un sujet véridique grave et alarmant, dont il est très intéressant et nécessaire de comprendre et de savoir.
Zulu traite de l'apartheid avec le fameux et abject et surtout épouvantable projet coast. Le projet Coast fut un plan de création d'armes bactériologiques chimiques créé par les services secrets de l'Afrique du Sud blanche, à l'époque dirigée par Wouter Basson surnommé le docteur la Mort, ayant pour tache de contrôler la population noire en créant un composé chimique ne tuant que ceux de couleur noire afin de les stériliser. Ce programme fut maintenu près de 12 ans, de 1981 à 1993 et plus de 200 personnes noires furent tuées pendant les tests durant l'apartheid. Ce programme finit par être révélé au grand jour. Il est juste incroyablement monstrueux, de se dire que la plupart des responsables de cette abomination furent acquittés. En 2002, même Wouter Basson le fut, malgré tout, il eut encore le droit d'exercer son métier de docteur. Il aura fallu attendre 11 ans (soit en 2013) pour qu'il soit finalement condamné.
UNE HONTE !
C'est donc de cela que traite le film Zulu, au cours d'une investigation passionnante et pleine de rebondissements d'une intensité dure avec beaucoup de sensibilité poignante. Zulu n'est pas juste que l'adaptation d'une histoire vraie, c'est avant tout un excellent thriller se passant au cœur d'une Afrique du sud qui n'en a clairement pas fini avec l'apartheid, ce qui a pour conséquence d'obtenir une production autant nerveuse qu'intense, qui met en colère.
La mise en scène est directe et nerveuse, les images sont du début à la fin d'une force incroyable. Les scènes d'action sont filmées au plus près, caméra à l'épaule pour plus de réalisme, ce qui ajoute beaucoup de crédit et de tension à cette fulgurance déjà palpable. Des images fortes, d'une violence étonnante à travers des décors traitant avec beaucoup d'ingéniosité la désolation de ce monde. Malgré cette violence, Zulu ne tombe jamais dans la gratuité, au contraire, les séquences sont à la hauteur des thèmes impactant évoqués, ainsi que de la cruauté et de l'insensibilité réaliste de l'Afrique du sud sur fond de discrimination.
Techniquement parfait, doté d'une narration aux petits oignons avec des acteurs hallucinants ainsi qu'une bande-son frappante signée Alexandre Desplat, qui a obtenu avec cette partition la récompense de l'"Étoile d'Or" du compositeur de musique originale, rien que cela. Amplement mérité, mais je regrette clairement que d'autres n'ait pas eu ce privilège comme les acteurs, ou même le réalisateur, car le boulot effectué est impeccable, sachant que ce film a servi à clore le festival de Cannes 2015.
L'interprétation des deux acteurs principaux est monstrueuse, étant le point névralgique de cette oeuvre. À eux deux, ils apportent une véritable dynamique, ils sont totalement habités par leurs rôles qui transpirent de vérité. La vision de deux flics désabusés et traumatisés, incarnés par Orlando Bloom et Forest Whitaker. Avec une justesse implacable, ils essaient tant bien que mal de remettre en ordre ce qui reste d'une société détruite par les sévices de l'absurdité humaine.
Orlando Bloom nous surprend en détruisant littéralement son image de beau gosse, dans le rôle sombre et décadent de l'inspecteur Brian Epkeen, un personnage dépressif et alcoolique. On reconnaît à peine le comédien tant il est à des kilomètres de ce à quoi il nous avait habitués. Le réalisateur Jérôme Salles l'a totalement sortie de sa zone de confort en le poussant dans ses retranchements, à un point où cela fut dur pour le comédien. Je lui savais pas un tel talent, certainement la meilleure performance de sa carrière.
Forest Whitaker dans le rôle de l'inspecteur en chef "Ali Zokhela" est saisissant. Un acteur toujours aussi exceptionnel, touchant et possessif avec son public, qui ici possède en lui une chose encore plus forte que je n'arrive pas à nommer, mais qui est incroyable au point de prendre aux tripes. Le comédien mérite totalement son oscar pour meilleur acteur, Orlando Bloom pour celui du meilleur second rôle. Avis totalement assumé !
Le cinéaste Jérôme Salle présente un excellent travail de réalisation, prouvant que les Français avec un véritable budget et une inspiration adéquate peuvent faire de très grands films. La manière dont il appréhende la noirceur de la nature humaine me surprend à chaque fois. Il a clairement fait un carton plein avec Zulu.
CONCLUSION :
À la fois glaçant et viscéral tel un coup de poing à l'estomac, Zulu est le bilan calamiteux et alarmant d'une Afrique du Sud en miettes après l'abrogation de l'apartheid. Un récit faisant froid dans le dos retranscrit à travers une ambiance terrible qui nous immerge dans un thriller haletant à la technicité hors pair, dans décors assez chaotiques. Poignant, vif, haletant et saisissant, une oeuvre qui met les nerfs à rude épreuve devant tant de noirceur !
Un superbe thriller, un véritable chef d'oeuvre !