Twist à St Tropez
CRITIQUE PLEINE DE SPOILERS, Si tu veux perdre 50h de ta vie sans soluce pour avoir le fin mot d'une histoire pas si géniale que ça, alors fuis. Il ya un texte qu'un copain canidé connait beaucoup et...
le 10 avr. 2016
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Jeu de ChunSoft, Kôtarô Uchikoshi, Spike et Aksys Games (2009 • PC)
Cette critique ne contiendra aucun spoiler majeur et si critique trop longue, vous avez comme d'habitude les + et les - en fin de critique.
Y'a des jeux, comme ça, que vous pouvez pas trouver mauvais, parce qu'ils ne le sont pas, même avec une grosse dose de mauvaise foi. Ils ne sont pas mauvais mais peuvent demeurer des expériences frustrantes, à cause d'un axe central déconnant. Et c'est un peu ça, 999 : un jeu qui a de bonnes idées, une envie de créer une narration maline mais des choix discutables qui m'ont laissé très dubitatif après avoir complété le jeu dans son intégralité.
Critiquons !
Junpei, notre héros, se réveille dans ce qui ressemble à une cabine, après avoir été gazé par un mystérieux homme masqué alors qu'il rentrait chez lui. Très vite, il comprend qu'il a été piégé - lui et 8 autres personnes - dans un Escape game sadique, à base de portes verouillées, de bracelets numérotés, de navire en train de couler et de bombes dans le ventre, promettant aux tricheurs une mort particulièrement sale. Aucun des participants n'ont la moindre idée de ce qu'ils font là et ils n'ont que 9 heures et 9 portes pour trouver la sortie...
Cette prémisse, promesse de bons moments de stress et de tombés de masque qui vont faire mal, déroule un scénario qui dans un premier temps, peut paraître cousu de fil blanc... les premières révélations sur la possible identité de Zero, l'instigateur de tout ce foutoir, sont perceptibles dès l'intro et on peut se trouver à sourire de façon un peu méprisante en se disant que le jeu n'est pas hyper subtil... jusqu'à ce qu'on termine une première fin, qu'on en fasse une seconde, puis une troisième... (six fins au total) et qu'on comprenne comment le jeu fonctionne.
L'histoire est en réalité beaucoup plus intelligente qu'on ne pourrait le penser de prime abord et sait très bien exploiter ses embranchements de scénario et sa mécanique principale - la contrainte des chiffres pour ouvrir les portes, qui oblige les 9 protagonistes à faire équipe qu'ils le veuillent ou non. Tout ça en gérant un "Wodunit" multiple où on en vient à douter d'absolument tout le monde et où on comprend qu'on peut parfaitement très mal finir, faute d'avoir pris la bonne route et surtout compris les tenants et aboutissants de l'histoire pour neutraliser le danger, qui ne se dévoile d'ailleurs que dans deux fins sur les six. 999 est vraiment ingénieux sur la façon qu'il a de jouer sur les informations qu'il distille, comme des pièces de puzzle, en flirtant constamment avec le quatrième mur, conscient qu'il s'adresse surtout au joueur plutôt qu'à Junpei. C'est l'immense force de ce titre, et sa fin - et le petit twist qui va avec - révèle quelque chose d'assez intense, qui modifie toute la vision qu'on avait des évènements.
Servi en prime par un chara design léché - l'animation est sommaire mais bien là - un doublage nippon de qualité et quasi intégral (et disponible, ce qui fait plaisir, vu qu'à côté de ça, on peut se brosser pour une trad française), que peut-on demander de plus ?
Ben que le reste suive. Et c'est là que ça commence à sentir la poudre...
Le jeu se déroule donc comme un visual novel - une importante partie narrative où l'on fait défiler du texte sur des illustrations ou des incrustations de personnage, doublés, donc - auquel on a accolé des phases d'évasion, durant lesquelles les personnages doivent explorer les lieux, ramasser des items, les utiliser et résoudre des énigmes afin de pouvoir sortir et de continuer à avancer sur le navire où ils sont piégés. Si cette structure vous rappelle quelque chose, c'est normal, on va en reparler.
Les énigmes, d'abord.
Ce n'est pas tant qu'elles soient trop simples - pour un joueur normal, elles font largement le café - mais elles sont malheureusement assez répétitives (généralement des trucs à décoder avec les deux principaux langages codés du jeu, qui ne sont franchement pas difficiles à piger) et surtout, le jeu a la sale manie de vous donner trop d'indices alors que vous ne lui avez littéralement rien demandé, au lieu de vous laisser chercher. Du coup, on bute rarement, et si ça arrive, c'est bien souvent à cause d'une faute de game design particulièrement chiante : ce moment où le joueur a compris mais pas son avatar. Mais si, vous savez bien, ce moment où vous SAVEZ quel est le truc à utiliser mais que votre héros n'acceptera de le faire qu'après avoir parlé à Monique et examiné douze fois le poulet en plastique pour être sûr. Ben y'a pas mal de ça dans 999, et autant on peut l'excuser dans des point n' click vieux de vingt ans, autant pour un jeu post 2000, c'est difficilement acceptable. Le jeu est beaucoup trop dirigiste et sa partie narrative trop invasive dans le gameplay. Le résultat, c'est qu'on est jamais coincé pour les bonnes raisons : plus que les codes de Zero, on se retrouve souvent à déchiffrer comment le jeu a été programmé pour trouver le déclencheur, au milieu de bavardages parfois très chiants.
Et bavard, le jeu l'est. Trop. Même pour un visual Novel. Et pour cause...
Bon. Si vous êtes un Weeaboo vous n'aurez probablement pas le problème mais si ce n'est pas le cas, les personnages de 999 risquent d'être assez... clivants. Pour rester sympa. On est sur les classiques stéréotypes de manga/anime : le gros nounours, la petite pile électrique à cheveux fluos, le beau gosse un peu androgyne qui parle doucement, la MILF un peu garce, etc... à ce stade, j'appelle ça un cahier des charges. Et le gros problème c'est que d'une, ce genre de stéréotypes sont très datés (je pense qu'ils l'étaient déjà en 2009) et de deux ces stéréotypes ne la ferment ja-mais. Parfois pour donner des informations essentielles et parfois simplement pour... exister, ce qui est rarement très heureux. Ça aurait pu être une mécanique de jeu, pour les voir surmonter leurs antagonismes et leurs limites afin de survivre mais non. Ils restent simplement confits dans leurs clichés et même les informations qu'ils vous donnent ne trahissent rien de spécial, comme une spécialisation dans un domaine, par exemple, qui aurait pu affiner leur personnalité. Il faut donner une explication sur la glace carbonique ? N'importe quel perso fera l'affaire, même chose pour parler Égyptologie ou mathématiques : les personnages de 999 sont réduits à des fonctions, et même pas des fonctions silencieuses. Couplé à une histoire qui elle est bien plus maline et subtile qu'eux, ça donne ce résultat frustrant, celui de ne pas pouvoir apprécier à fond ce que le jeu a à offrir, d'autant que sans trop en révéler, la totalité de l'intrigue tourne autour du PIRE personnage et de ce que je pense être le cliché le plus insupportable des héros/héroïnes d'anime. Pour vous donner une idée de la tonalité du truc : il y a trois prises d'otage potentielles pendant le jeu. Devinez le sexe de l'otage et sa réaction lorsqu'elle se fait attraper par le bras ? Voilà. Vous voyez. Personnellement, même en 2009 je n'aurais pas réussi à m'attacher à ce genre de figurines unidimensionnelles. Alors quinze ans plus tard...
Je pourrais aussi critiquer le manque de cohésion visuelle du bateau - prison (ok, en partie justifié par sa nature mais quand même...), sur un manque certain d'ambiance et d'atmosphère, notamment parce que le jeu n'essaie pas de s'en donner une ou sur la rigidité de son système pour refaire des parties en sautant des portions de jeu déjà faites (une manip à priori anodine m'a quand même fait effacer TOUTES les fins gagnées jusque là) ou même sur la détestable tendance qu'a le jeu à crasher sur PC. Mais je vais résumer le problème central de 999 de façon plus directe : il emprunte aux Visual Novel Japonais, à Professeur Layton (sorti 2 ans plus tôt), et à Phoenix Wright (qui en était à son 5ème opus) et fait globalement tout moins bien qu'eux. Alors moins bien n'est pas mal - j'ai un peu saucé les personnages mais ils ne sont mauvais qu'en comparaison d'une histoire qui les surpasse en qualité, en définitive - mais reste moins bien. Jouer aujourd'hui à Layton ou Phoenix Wright c'est jouer certes à des jeux vieillissant et pas mal rigides mais qui conservent l'essentiel de leurs qualités. Passer derrière sur ce 999 c'est avoir le sentiment de jouer à un jeu qui a tout misé sur son idée - sa très bonne idée - de scénario et de mécanique narrative mais n'a visiblement pas appris de ses aînés pour tout le reste. Pas un échec - loin de là - mais si comme moi vous êtes friands de Visual Novel et autres jeux affiliés, vous ne pourrez pas vous empêcher de faire défiler en accéléré une bonne partie des dialogues pour ne conserver que le cœur de ce qui fonctionne et probablement oublier peu à peu 999 lorsque vous l'aurez fini. Et il méritait vraiment mieux qu'être si loin derrière ses concurrents, coincé derrière une porte qu'il a lui-même verrouillé.
+ Son scénario
+ La manière dont la narration se déroule via les différents embranchements et la manière très méta qu'elle a de tous les relier
+ Sa révélation de fin
+ Son chara design
+ Doublage japonais disponible et de qualité
+ Ses personnages clichés et trop bavards
+ Enigmes un peu trop répétitives dans leur nature
+ Le jeu assiste clairement trop le joueur sur la résolution de celles-ci
+ Les lieux manquent d'atmosphère et donnent un effet "patchwork" qui manque de charme
+ La musique, clairement pas adaptée quand il faut l'écouter en boucle pendant la résolution d'énigmes
+ Système de rejouabilité rigide et pas toujours bien pensé
+ Crash assez nombreux sur PC
Créée
le 15 avr. 2023
Critique lue 15 fois
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