Au détour d’un commentaire youtube, je lisais l’autre jour une phrase pleine de sens : « Si les jeux vidéo indépendants m’ont appris quelques choses, c’est que tous les jeux avec des insectes sont des chefs-d’œuvre » Il citait par la suite l’incontournable Hollow Knight, le fort sympathique Into The Breach et en troisième un jeu que je ne connaissais pas : Bug Fables, the Everlasting Sapling. Ayant une passion toute enfantine pour les arthropodes en tout genre ce fut vite décidé : il fallait que je me lance dedans pour savoir si cet inconnu avait raison.
Et donc Bug fables qu’est-ce que c’est ?
Bug l’éclair
Pour comprendre le style de jeu auquel se rattache Bug Fables, il faut parler de deux autres séries de jeux : la série des Mario et Luigi et sa cousine la série Paper Mario. Les deux sont des rpgs qui ont pour force leur humour, leurs scénettes décalées, toujours un peu moqueuses des actions héroïques des protagonistes habituels et leur système de combat dynamique remplit d’actions contextuelles qui changent de la sainte trinité Attaque/Magie/Soin qui règne en maître incontestée dans la majorité des jrpg. Et comme les Paper Mario ont peu à peu abandonné cette recette pour se tourner vers un gameplay orienté plateforme il ne restait plus qu’à quelques bonnes âmes (ici le studio moonsprout games) de prendre la relève et de refaire une nouvelle tambouille dans la vieille marmite.
Nous troquons donc Mario, Luigi, Peach et le Royaume Champignon pour la contrée de Bugaria, vaste (pour des insectes), mystérieuse (pour des insectes) et pleine de danger (pour des insectes, encore une fois).
Notre aventure commence donc avec Kabbu, un scarabée fort et loyal venue d’une lointaine contrée du nord et qui a rejoint Bugaria pour participer à la quête qui anime toutes les ruches, fourmilières et termitières de l’endroit : retrouver… l’arbrisseau éternel, sensé apporter puissance et immortalité à quiconque en boit la sève.
Bee my girl
Mais loin d’être une quête épique, l’aventure de nos petits amis sera surtout agrémentée de moultes situations comiques et commentaires sociaux en décalage entre le point de vue d’insectes sentients et les sociétés insectes qui dans la vraie vie ont une structure fascinante… et étrange.
Kabbu sera donc très vite rejoint par Vi, une jeune abeille impulsive et égoïste qui a rejeté son carcan d’ouvrière à miel pour explorer le monde afin de… devenir riche et Leif une Mite pince sans rire dont les commentaires comme la magie ont le don de jeter un froid, ou de briser la glace.
Si ce n’est donc pas avec la trame principale que l’on va retrouver la patte d’originalité du jeu, celle-ci est largement compensée par toute l’attention qui a été portée au worldbuilding de ce petit univers.
Le jeu est en effet rempli de pnj uniques et de dialogues contextuels qui apportent des tonnes et des tonnes d’informations très intéressantes et divertissantes sur le fonctionnement de Bugaria. Des informations qui vont des stéréotypes associés à certaines espèces (les libellules sont toutes des voleuses) à l’organisation de la structure familiale (comme toutes les fourmis/abeilles sont sœurs elles ont tendance à appeler sœur tout autre insecte ayant grandi avec eux) jusqu’à la longévité anormale de certains spécimens (les insectes « classiques » vivent aussi longtemps que des humains, les reines vivent plusieurs siècles). Rajoutez à cela un grand nombre de quêtes annexes qui n’ont rien d’anecdotiques (sur la soixantaine de quêtes seulement deux sont de bêtes « quête de chasses ») vous allez pouvoir passer des dizaines d’heures à explorer toutes les idées des développeurs, pas mal pour un royaume qui fait la taille…d’un jardin.
Beetle them up
Mais dans toute cette histoire, comment on se castagne chez les insectes ? Et bien c’est très simple. Le système de base est un rpg au tour par tour, pas d’aléatoire bien entendu nous sommes dans le futur, mais le moindre contact avec des ennemis sur la map nous entraine sur un écran de combat.
De là chacun de nos personnages, peut attaquer, utiliser des objets, des capacités, mais aussi changer sa position dans le groupe, ce qui influe sur les dégâts ou relayer son tour à un allié. Et si le système reste assez simple dans les premiers chapitres, la récupération de plus en plus de médailles venant modifier les stats et les compétences rend le système bien plus profond qu’il n’y parait
Et le jeu vous pousse à chercher comment abuser du système, car la difficulté fait que les boss vont vous envoyer promener si vous vous ramenez en touriste. Heureusement pas de softlock possible, vous aurez toujours la possibilité de retourner refaire votre stock de jus de puceron et revoir la répartition de vos médailles. Et chaque victoire est un moment mémorable. Chaque boss possède son propre thème musical, ses petits patterns d’attaques à repérer, et ses phases à apprendre. Et si vous êtes en train de vous dire « Au pire j’irais juste gagner de l’expérience jusqu’à ce que ça passe tout seul » et bien ce ne sera pas le cas, la formule de gain d’xp va vous prendre en traître et passé un certain niveau, les combats classiques ne vous rapporteront tout simplement plus rien.
Donjons et Dragonflies
Quant à ce qui se passe en dehors des combats, vous allez retrouver tout plein de petites énigmes à passer via les compétences de nos protagonistes. De manière non exhaustive : Kabbu peut trancher de l’herbe avec sa corne, Vi peut lancer son… beemerang (si,si) pour activer des interrupteur et Leif quand à lui gèle les gouttes d’eaux pour créer plateformes et autre pièces de puzzles. Et si vous vous lassez un peu, sachez que les personnages ont une discussion contextuelle pour CHAQUE salle présente dans le jeu, une quantité de blagues, lore et morceau de backstory absolument immense… Si vous n’oubliez pas d’appuyer sur select dans la moitié des salles comme moi.
L’exploration et les combats sont magnifié par la bande son composée par Tristan Alric. Le nombre de thèmes de combats est indécents (Au moins 15 !), et viennent renouveler le plaisir de concasser de la chitine. Quant aux thèmes des différentes zones, ils ne sont pas en reste et viennent ajouter une touche glauque ou joyeuse aux différentes locations que le scénario nous envoie visiter.
Finalement Bug Fable c’est un peu l’anti Hollow Knight. Là ou ce dernier est silencieux, mélancolique et glauque, ou tout hallownest n’est là que pour essayer de te dévorer. Bugaria est royaume jovial, grouillant d’insectes en quête d’un sens à leur existence, de comprendre pourquoi ils se sont un jour réveillé capable de parler et de penser. Et si la trame principale de retrouver un énième artefact omnipotent ne vous fascine pas. Le voyage a travers toutes les paysages et peuples de Bugaria vaut largement le détour, il y a beaucoup d’humanité dans très peu de centimètres chez ces insectes là. Quant à mon illustre inconnu de youtube, je lui donne 100% raison et j’espère qu’il continuera d’avoir vu juste pour longtemps.