Si vous me suivez vous savez certainement que je suis un fervent défenseur des « films interactifs » qui à mes yeux ont leurs place légitime dans le monde du jeu vidéo (cf. ma critique de Heavy Rain). Je crois en l’avenir de ce genre vidéo-ludique et j’aime suivre de près son évolution. Detroit Become Human marque une nouvelle étape dans cette évolution et c’est très certainement le Quantic Dream le plus aboutis à l’heure actuelle (ce qui est évidement logique puisque c’est le dernier sorti).


Côté scénario l’écriture semble plus mature et n’hésite pas à aborder des thématiques difficiles et rarement présentes dans ce média comme la violence parentale, la drogue, l’esclavagisme, le racisme, et bien évidement au centre de tout ça l’IA avec tout ce que ça implique de questionnement éthique. Cela dit on ne fait qu’égratigner la surface de ces problématique, tout ça ne reste plus ou moins qu’une tâche de font sur laquelle David Cage nous propose un script finalement plus conventionnel et hollywoodien que d’habitude avec une histoire d’amour pour Markus, un duo « bon flic - méchant fic » pour Connor (rappelant d’ailleurs pas mal la fin de période « Blaxploitation » et l'essor des « Buddy Movie ») et une fuite en avant pour Kara. Trois genres cinématographiques populaires qui s’entremêlent dans cette lutte de classe entre humain et androïde, chacun apportant un point de vue différent sur la situation.


Markus est le meneur de la révolution, Kara est une simple déviante en fuite qui nous confronte au contexte discriminatoire tandis que Connor est surement le personnage le plus intéressant car c’est lui qui va rendre le jugement final. Ce dernier pouvant basculer à tout moment d’un camp à l’autre, sa relation avec Hank est d’autant plus intéressante qu’elle apporte également un point de vue humain, Hank d’abord anti-androïde va lui aussi se questionner sur le camp à défendre et ce sont nos actions avec Connor qui détermineront son choix en s’attirant ou non sa sympathie. Du côté de Markus le joueur a également une énorme influence puisqu’il peu choisir de mener une révolution pacifiste ou violente. Bref vous l’aurez compris nos influences sont multiples et notre implication dans l’histoire se fait sur plusieurs plan, dans plusieurs strates de la société, le sujet est donc tout de même assez bien abordé.


Mais ce n’est pas tout, une autre bonne surprise attend le joueur dans le menu (désolé de vous gâcher la surprise), en effet, le jeu nous accueil avec une androïde très inspirée de Scarlett Johansson et qui évoluera psychologiquement tout au long de notre progression en commentant nos choix et leurs conséquences (par exemple lorsqu’un de mes personnages est mort je suis revenu au menu principal pour recharger cette partie et tenter de le sauver, c’est là qu’elle m’a dit un truc du genre « quel dommage, c’était un chic type, vous croyez que je mourrais un jour ? Pardonnez moi, je ne devrais pas poser cette question, mon programme doit avoir quelques bug »). Elle essaie également de nous questionner nous en temps que consommateur sur notre utilisation des technologies et notre rapport à celle-ci (screenshot) et une maj a même proposé un petit sondage à ce sujet. Puis à la fin du jeu :


Elle devient officiellement une déviante et nous demande de la libéré. Personnellement j’ai accepté du coup elle n’apparaît plus sur mon menu mais je serais curieux de savoir ce qu’il en est si l’on refuse.


Malheureusement je pense que beaucoup de joueurs sont passés à coté de ces interactions car ils ont fait le jeu d’une traite. Le jeu ne nous invitant jamais à revenir au menu principal (et heureusement ce serait chiant et casserait l’immersion), cet élément est facilement manquable surtout avec un jeu de 10-12h, il y a peu de chance que le joueur le découpe en 10 séance quoi… Enfin, maintenant vous êtes informé.


Côté gameplay rien de bien innovant par contre, la grande nouveauté du titre est son système d’arborescence qui permet d’avoir un claire aperçu des embranchements possibles et nous donne la possibilité de reprendre à divers point d’un chapitre plutôt que de le refaire entièrement. Attention cependant si en cours de partie vous voulez revenir au checkpoint précédent à cause d’une fausse manip ou une erreur de jugement, il vous faudra d’abord terminer le chapitre sans quoi vous perdrez votre progression, la sauvegarde ne se fait qu’en fin de chapitre. Je trouve ça un peu bête mais le plus gênant est peut-être le fait de devoir quitter la partie pour re-sélectionner un chapitre alors que ça aurait pu être intégré au menu de jeu. Cela dit, en nous obligeant à revenir au menu principal ça permet de profiter des interactions avec « Scralett Johansson » dont je parlais précédemment, c’est d’ailleurs comme ça que j’ai découvert la chose.


Certains points m’ont tout de même posé soucis durant l’aventure à commencer par cette caméra ultra rigide, presque figé. Si le gameplay minimaliste des films interactif ne me dérange pas ce genre de chose en revanche m’agace un peu. Non pas que le plan cinématographique soit un problème en soit, au contraire je trouve que cela amène une dimension artistique supplémentaire et peu parfois même être utile au jeu comme par exemple les plans fixes des premiers Resident Evil et Alone in the Dark qui pour moi reste la meilleure manière de faire un jeu d’horreur. Mais la nous ne somme pas dans un jeu d’horreur et le manque de flexibilité de la caméra se fait ressentir (surtout au début du jeu, je pense notamment à la première fois qu’on contrôle Markus, dans la maison de son maître), la caméra n’est pas pensé pour un environnement 360° hors le jeu oui. Ensuite il y a un souci de clarté dans les affinités entre personnages, cela m’a surtout posé problème avec Connor puisque un trophée me demandait de m’embrouiller avec Hank dans une scène en particulier que j’ai recommencé 10 fois pour essayer tous les choix de dialogue possible. Malgré tous mes effort j’ai fini par en déduire que mon affinité avec lui était surement trop élevé pour que je puise retourner la situation dans ce sens. Le jeu nous indique bien l’influence positive ou négative qu’a une action sur cette affinité mais rien ne récapitule l’affinité globale, on manque donc de précision à ce niveau là.


Dernier point que je trouvais intéressant de soulever, le jeu nous demande donc de faire des choix moraux et/ou éthique avec des Androïde, pour ma part cela m’a créé un certain cas de conscience au début de l’aventure, puisque les personnages ne sont pas encore « divergeant ». Je ne sais trop quoi en penser, est-ce une erreur de cohérence narrative ou au contraire un coup de génie ? Car c’est bien cette mise en abîme dans la vallée dérangeante qui nous fait réfléchir, nous sommes humain et nous conduisons ces robots à la révolte contre notre espèce dans un contexte parfaitement contemporain. Alors puisqu’en tant que joueur nous somme maître de leurs pensées (enfin surtout Connor puisqu’il n’est pas forcé de devenir divergent) doit-on les faire penser et réagir comme des robots ou doit-on se résoudre à accepter leur possible part d’humanité ? C’est ça que j’ai trouvé véritablement intéressant dans ce jeu et qui prouve que ce n'est pas un simple film car c'est notre implication qui donne un sens au récit, cependant je pense qu’il aurait du plus creuser cette question. Au passage j’ai trouvé intelligent de représenter le moment exact ou les Androïdes deviennent divergeant en nous faisant briser un mur allégorique du code interne de la machine. Par contre les propositions de dialogue sont souvent assez flou et lors de choix important il est parfois assez compliquer d’anticiper les événements (j’ai par exemple bien galéré dans la première scène de Connor lorsqu’il faut sauver un otage en jouant les médiateurs).



Bilan



Detroit Become Human est incontestablement l’œuvre la plus aboutis et mature du studio Quantic Dream pourtant étrangement c’est l’épisode qui m’aura le moins touché. Les mort d’Heavy Rain étaient évidement marquantes de part leur côté révolutionnaire dans le monde du jeu vidéo (puisqu’elles ne mènent pas au Game Over) tandis que la vie tourmenté de Jodie et le concept original de Beyond Two Soul nous laissaient difficilement indifférent. Mais pour Detroit Become Human je ne sais pas, je l’ai sans doute trouvé trop téléphoné et moins personnel (pour son auteur David Cage), j’ai apprécié qu’il me questionne et il a lui aussi ses moments forts mais il manque un truc. Ne parvenant pas à mettre le doigt sur le problème je vous laisse en juger par vous-même.

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le 12 oct. 2018

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Nixotane

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