- Ce papier a été publié dans le Canard PC n°233 -
J'aurais dû me douter que mon arrivée à la rédaction de Canard PC allait me marquer. Mais non, je n'ai pas été assez méfiant, j'ai surestimé ma résistance mentale. Et sans même avoir eu le temps de dire "Camille Lacourt", me voilà ludiquement martyrisé : toutes mes réflexions sur ma condition de joueur se voient malmenées, et mon parcours vidéoludique complètement remis en question.
C'est Boulon le responsable, c'est à cause de lui que ma psyché est détraquée. "Tiens, on a reçu un exemplaire de Summer Challenge, c'est toi qui va le tester." A cet instant précis, cette phrase me paraissait encore anodine. Pauvre inconscient crédule que j'étais.
J'ai commencé à me douter qu'un truc clochait en voyant la jaquette. Encore naïf, j'ai immédiatement essayé de me rassurer, me disant qu'une jolie boite ne faisait pas un bon jeu. Mais, aujourd'hui, j'ai appris qu'un tel doigt levé aux codes de l'esthétique ne pouvait être qu'une mise en garde. La diarrhée visuelle annoncée en couverture se retrouverait non seulement dans le jeu, mais ferait en plus écho au gameplay, véritable ode au non-sens. Alors oui, j'y ai trouvé des sports rappelant les bikinis et la transpiration estivale, et on peut dire que jusqu'ici, la première moitié du titre est parfaitement justifiée. Par contre, le terme "challenge" me semble un peu excessif, fleurant presque le foutage de gueule.
Summer Torture : Pain in the ass tournament
Chaque épreuve ressemblait à un mini-jeu sous forme de QTE raté. Soit réduit au strict minimum, comme pour la course où il suffisait de marteler deux touches frénétiquement, soit à la limite du compréhensible, pour les lancers et les sauts... Quand je pensais avoir compris la mécanique, quelque chose foirait. Quand j'étais complètement paumé, j'explosais les highscores. N'avais-je pas maintenu la touche assez longtemps ? Avais-je appuyé sur celle-ci au bon rythme ? Dieu m'en voulait-il personnellement ? A chaque épreuve, un foutu facteur chaos rajoutait de l'aléatoire, de l'injustice même, au gameplay déjà exécrable. A chaque échec, la frustration montait et je n'éprouvais aucune satisfaction lors de mes rares et incompréhensibles réussites. Successivement, j'ai été tenté puis déçu par huit sports (course, lancers, sauts, trampoline, tir à l'arc, escrime, plongeon et natation) et leurs déclinaisons en différentes disciplines (soit le choix de tapoter les flèches de votre clavier sur 100 m ou 1,5 km). Puis, la lumière ! Un mode "Carrière" proposant une arborescence de disciplines, des points d'expérience, et un coach. Mais, je déchantais rapidement : l'inutilité de ce mode était aussi certaine que son design douteux. un design à l'image du reste du jeu, techniquement passable, certes, mais se vautrant dans le mauvais goût. L'image d'une mascotte psychédélique à faire pleurer les enfants - un tigre radioactif à casque romain - me hantera encore longtemps. Et je passerai sous silence les sportifs tektonik sortant tout droit d'une techno parade, dont les animations faciales me rappellent encore les crispations de ma dernière gastro. De quoi vous réveiller la nuit, en nage, hurlant "Nan, pas l'équipe allemande !".
Notre AVIS :
Avant d'arriver à la rédaction, j'avais encore foi en quelque chose. Gavé aux Space Invaders, Metal Slug et autres VVVVVV, je restais persuadé qu'en associant un concept bien hardcore et un gameplay dont les contrôles se comptent sur les doigts de la main, de véritables perles pouvaient voir le jour. Et quoi de plus hardcore et inaccessible que l'athlétisme pour un joueur qui passe ses journées devant un PC ? Malheureusement, SCAT ne procure ni les bienfaits du sport, ni les plaisirs du jeu. Je crois bien que cette chose a détruit le peu d’innocence qu'il me restait.