Une suite qui s’égare malheureusement dans une surenchère d’action, de violence et de spectaculaire pour sombrer parfois dans le ridicule, que ce soit dans sa narration ou même ces séquences de gameplay. L’émotion en prend un sacré coup tout comme la cohésion de son univers malmené par des séquences Unchartedesques pas toujours opportunes ou une aspiration Fantasy qui empiète de plus en plus sur la vraisemblance de son récit et même des réactions de ses personnages.
Je garde un excellent souvenir de l’opus original qui proposait une expérience épurée et parfaitement maîtrisée dans son rythme mais ce second volet peine hélas grandement à renouveler son propos et se voit contraint de multiplier les séquences choquantes pour maintenir l’immersion du joueur à fleur de peau, quitte à atteindre la saturation d’une formule qui ne demandait peut-être pas à être réitérée. A l’image de son principal modèle Last Of Usien, cette suite se révèle beaucoup trop longue pour son propre bien et s’avère de surcroit gangrénée par instants par des grossièretés d’écritures assez étonnantes, de ses antagonistes souvent foireux à son misérabilisme excessif pour faire pleurer dans les chaumières ; c’est d’autant plus regrettable que cette expérience interactive propose toujours des trésors d’ambiances dès qu’elle fait enfin preuve d’un peu plus de sobriété dans son propos.
Après un premier tiers cahoteux (pour ne pas dire calamiteux par moments), Requiem lâche enfin la corde du violon et laisse ses personnages s’épanouir durant de précieux instants : une zone enfin ouverte, davantage axée sur l’exploration que l’affrontement ; un renouvellement d’ambiance adéquat et une complicité entre les protagonistes qui fait soudainement mouche : il n’y a pas de secret, c’est dans son absence d’action que Plague Tale trouve son plus bel éclat et cette respiration salutaire dans le récit permet d’insuffler un nouvel élan à une structure déjà essorée ; d’autant que l’enrobage visuel et sonore demeure d’une facture exceptionnelle. Les décors parviennent constamment à nous faire décrocher la mâchoire, même quand on pense que le titre a déjà livré toutes ses cartouches en la matière (ce sont véritablement les Naughty Dog français à ce niveau-là) et les compositions musicales s’avèrent aussi possédées que l’interprétation française qui confèrent une sensibilité tangible à ce monde fictionnel, même quand l’écriture et le gameplay entravent notre implication dans cette aventure. Hélas, le gameplay renoue vite avec ses écueils regrettables : après la formule très linéaire du jeu originel (s’apparentant presque à un jeu d’énigmes indirect dans la résolution de ses situations de combat), Requiem a souhaitée diversifier l’approche de jeu en fournissant bien plus d’outils au joueur pour affronter l’adversité ; malheureusement, le Level Design semble toujours englué dans une certaine rigidité et la spectaculaire programmation des rats peine à suivre les multiples possibilités accordées au joueur : il n’est ainsi pas rare qu’une poignée de rongeurs récalcitrants s’attarde sur le chemin, occasionnant une mise à mort grotesque des pauvres héros infortunés, ou même qu’une brindille de flammes entraîne la calcination immédiate d’Amicia (sans même évoquer nos compagnons toujours aussi invisibles aux yeux des antagonistes) ; bref, la lassitude survient rapidement et l’immersion s’en trouve à nouveau malmenée. Requiem semble avoir quelque peu raté le coche de consolider plus efficacement son gameplay et sa narration en proposant de véritables embranchements scénaristiques suite au comportement du joueur dans le feu de l’action (songez aux fameux dessins d’Emily dans Dishonored) ; galères de production ou démarche créative de vouloir garder un contrôle sur son récit, l’intrigue est toujours d’une constante linéarité, quitte à faire hausser plus d’un sourcil face aux réactions saugrenues des protagonistes durant les cinématiques après les actions accordées au joueur, peu de temps auparavant.
Je ne peux pourtant pas nier avoir été soufflé à maintes reprises par le périple interactif de Plague Tale : Requiem et dans le panel de réactions, parfois contradictoires, que le jeu parvient à susciter, il est l’un de ces titres dont je peine le plus à définir mon véritable ressenti à son sujet ni même à lui accorder une notation vraiment définitive (à l’image de son principal modèle pour lequel j’éprouve toujours un rapport d’amour-haine à l’heure où j’écris ses lignes). Peut-être l’enrobage est-il suffisamment impactant pour que je parvienne à mettre mon appréhension de côté, peut être l’affection suscitée par les souvenirs du premier opus est encore assez vivace pour me faire adhérer à cette proposition bien plus malhabile mais je pense principalement que le titre sait surtout se révéler poignant lorsqu’il n’est pas porté par une constante dramatisation ; à l’image de cet épilogue intimiste infiniment plus touchant que le chapitre final qui s’efforce outrancièrement de nous faire arracher une larme : le temps de l’innocence est peut être achevé mais c’est bien dans ses premières années que Plague Tale avait trouvé une véritable justesse de ton…Et peut être aussi de maturité.