Presque une heureuse surprise alors que l’on se sentait parfois trop ignorés par nos amis japonais, Ar nosurge – Ode to an Unborn Star (titre original : Surge Concerto: Ar nosurge – A Song that Prays for a Planet Being Born… rien que ça) débarque en Europe six mois après sa sortie japonaise (Tales Of Whatever si tu nous regardes… bisoux) et fait suite à un premier épisode qui lui ne foulera jamais officiellement notre territoire français, Ciel Nosurge, un simulateur de vie uniquement disponible en japonais sur Playstation Vita. Ces deux titres s’inscrivent d’ailleurs dans la gamme de jeux Nosurge Concerto qui utilisent le même univers, lui-même très inspiré de la trilogie Ar Tonelico, dépeignant un monde où le chant serait une forme de magie à la puissance inégalée, et les « chanteuses » des perles rares respectées qui ont toutefois besoin de catalyseurs pour s’exprimer pleinement. Si dans l’ensemble les Ar Tonelico ne s’en sortaient pas trop mal, le dernier épisode qui marquait le passage en 3D de la série, avait néanmoins laissé un goût amer de par ses combats bancals et sa réalisation médiocre.
« Et tu chantes, chantes, chantes, ce refrain qui te plait… »
Faisant preuve d’un peu d’originalité, le scénario d’Ar nosurge nous narre la triste histoire de l’Humanité qui après avoir fui sa planète d’origine puis colonisé la planète Ra Ciela il y a 5000 ans, doit faire face à l’explosion imminente de Bezel, son soleil devenu une géante rouge (donc, ça va péter sévère). Deux factions s’opposent alors, l’une dirigée par Kanoyeel kkll Preciel (Kanon) dont le but est de sauver la planète et calmer les ardeurs de Bezel, l’autre dirigée par Ionasal kkll Preciel (Ion) dont le but est de sauver l’Humanité en sacrifiant Ra Ciela et toutes les autres espèces pour en retirer l’énergie nécessaire à une téléportation générale sur une autre planète habitable. Les deux plans ayant échoué, Ra Ciela et Bezel disparaissent de l’univers et l’Humanité dérive alors à bord du Soreil, un vaisseau colonie gigantesque qui vogue dans l’espace infini où personne ne vous entend chanter. Poisse aidant, après plusieurs siècles d’errance, apparaît une étrange menace venue d’on ne sait où et qui prend l’apparence d’étranges créatures, plus connues sous le nom de Sharl. Cette invasion massive voit alors naître deux camps chez les humains, ceux qui décident de prendre le parti des Sharl et en font des divinités qu’ils vénèrent au sein de l’Eglise Genomirai située dans le district de Quanturv, et la résistance qui se retranche à Felion, dernier district fortifié dirigé par l’Impératrice Divine. Franchement, plus limpide que ça, tu meurs.
On fait alors la connaissance de Delta, un jeune homme amnésique (bah tiens, pour changer…) qui se lance dans la restauration après avoir travaillé pour Genomis, l’unité en charge de la lutte contre les Sharls. Rapidement rejoint par Casty (Cass pour les intimes), ils formeront notre premier duo, cette dernière étant dotée du pouvoir de chanter, et donc d’une puissance hors norme. Plein de malice, les développeurs n’ont d’ailleurs pas hésiter à faire de l’Impératrice Divine, une personnalité surprenante puisqu’elle tiendra le restaurant de Delta en son absence et fera preuve d’une double-personnalité inattendue. Notre premier couple sera rejoint un peu plus tard par un binôme plus original, Ion qui est une chanteuse venant d’un autre monde, et Earthes, son robot protecteur qu’elle aurait elle-même construit, et qui représente le joueur (donc vous). Ce quatuor aura alors fort à faire pour comprendre les tenants et aboutissants d’une histoire surprenante et intéressante qui dépasse largement le cadre du « Les Sharls sont les méchants, bouh » ou « ah mince, en fait les Sharls sont gentils, on s’est fait manipuler, zut ». D’autant plus que le jeu n’ayant pas été traduit en français, les moins anglophones d’entre vous risquent de suer pour comprendre ce qu’il se passe parfois.
« Quand l’âme est folle, le temps s’envole. Chantez en bastonnant … »
Bonne nouvelle pour nous, Ar nosurge revient aux amours mélodieux de Metafalica en oubliant complètement les errances maladroites du vilain petit Qoga. Moins bonne nouvelle, cette dernière mouture met pas mal de temps à démarrer et se montre complètement dépassée par ce qui se fait de nos jours, comme dans Tales of Xillia 2. Il est donc toujours question de choisir une chanson pour notre belle, et de la protéger pendant qu’elle chante. Que l’on soit accompagné ou pas, seul notre binôme du moment prend part au combat contre tout un tas de vagues d’ennemis qui viennent remplacer ceux tombés avant eux. Pour mettre un terme à cette marée qui tire parfois en longueur, il faut avoir suffisamment chargé la chanson pour qu’elle puisse éradiquer tous nos adversaires d’une traite. Redoutable pour faire le ménage, car bien que Delta et Earthes gagnent nettement en puissance et finissent par pouvoir se défaire de presque tous les ennemis assez rapidement, passant de l’un à l’autre à une vitesse impressionnante et enchaînant les combos de plus en plus nerveusement, les chansons restent le moyen le plus efficace de mettre un terme à des combats de plus en plus longs, certains pouvant atteindre les 50 vagues d’ennemis à abattre à la fin du jeu.
Pour pimenter le tout, le système repose sur les liens qui unissent une chanteuse et son protecteur, et aussi sur les émotions dégagées pendant un combat, et donc sur son efficacité à combattre et la défendre. Mais pour que ces boucliers vivants gagnent du galon il n’y a pas miracle. Absence de changement d’armes oblige, il faut en passer par la (très spéciale) synthèse (dansante) d’objets dont certains améliorent diverses caractéristiques (attaque, défense, vitesse de charge,…). Il faut également que la confiance soit maximale pour nos binômes, et c’est là qu’intervient le système de « plongée dans l’esprit » (ou Genometrics) qui permet à Delta et Earthes d’explorer les pensées de leurs compagnes (et pas qu’elles). Organisées par paliers, plus vous parviendrez à faire tomber de barrières mentales, plus vous débloquerez de puissants chants. C’est long, ça parle beaucoup, ça n’a parfois aucun sens logique, mais ça vaut le coup d’être tenté et d’y revenir régulièrement quand on tombe à cours de « diving points » (les points nécessaires à valider certains choix et réponses). Présentes depuis les Ar Tonelico, ces séquences incontournables vont de paire avec les bains (ici la Purification) qui sont également de retour. C’est bien connu, en prenant un bain, on apprend à mieux se connaître et on a tout loisir de… papoter. Accessoirement, cette phase de purification permet de s’insérer mutuellement des cristaux (… mais bien sûr) à divers endroits comme la tête, les bras, les jambes, le ventre ou les seins pour ces dames.
Visual Novel RPG option Lolicon
On en arrive à ce qui fait polémique dans Ar nosurge (et avant lui dans les Ar Tonelico) : le penchant très marqué pour le lolicon, maquillé par des justifications scénaristiques. Peu importe à qui vous avez faire, sous leurs airs de fillettes assez dénudées, elles auront toujours « beaucoup plus que tu ne penses » à l’instar de Shurelia qui étant une créature artificielle, avait plusieurs centaines d’années dans Ar Tonelico, mais un corps de gamine à peine formée. Il est même de notoriété que moins elles ont de poitrine, plus elles sont âgées. Dans d’autres cas, elles ne seraient pas des fillettes mais des êtres magiques intemporels (genom ou fées) qui feraient passer la pilule du malaise qui plane autour du jeu. Puisque tout est bien fait, les Genometrics qui représentent les pensées refoulées, peurs, fantasmes et autres joyeusetés de l’esprit torturé d’un être intelligent, permettent également de contempler quelques images amusantes à tendance sado-maso. Mais comme toujours, on peut aussi mettre ça sur le compte de votre esprit plus ou moins dérangé car après tout, les parents que vous êtes peut-être ont déjà vu leur(s) enfant(s) nu(s) sans pour autant avoir de pensées pédophiles. Replacé dans le contexte du jeu et compte tenu de son pays d’origine, rien n’est réellement choquant. Reste que vu de l’extérieur, ça n’est pas un jeu qui trouvera un écho favorable et tolérant auprès de n’importe quel public.
La mise en scène peut également laisser perplexe dans certains cas. Si les cinématiques type manga sont courtes mais agréables, les interminables échanges pour un oui ou pour un non, à base de quatre ou cinq animations, sont nettement plus soporifiques et rasoirs. Sans compter les aberrations logiques tel le déblocage de nouveaux récipients de synthèse qui est toujours une plaie sans nom. Une fois une (longue) discussion terminée, vous devez parler de nouveau au génie créatif du coin pour pouvoir consulter la liste des nouveaux objets à synthétiser. Puis vous devez sortir du menu afin que s’enclenche éventuellement un nouveau (long) dialogue, puis lui parler de nouveau, synthétiser, partir, parler, synthétiser, partir, parler, synthétiser, partir, … C’est d’une lourdeur incroyable et l’on doit parfois enchaîner une dizaine de discussions avant d’être sûr et certain d’avoir fait le tour de toutes les nouveautés possibles. Ce boulet que l’on traîne du début à la fin du jeu est tout juste sauvé par les inventions parfois délirantes de nos savantes folles, à l’instar de ce semblant de sculpture qui contient en son sein une fusion nucléaire perpétuelle qui pourrait détruire plusieurs vaisseaux comme le Soreil sur un malentendu … mais … euh ?
Conclusion
Malgré ses imperfections récurrentes dont n’arrivent pas à se débarrasser les développeurs, Ar nosurge reste une valeur sûre du JRPG, offrant un univers toujours aussi original, des personnages relativement singuliers, et un système de combat qui devient de plus en plus nerveux et défoulant, le tout sur fond de visual novel où l’on passe des heures et des heures à découvrir ce que cachent nos chanteuses au plus profond de leurs esprits fermés. Une curiosité du genre qui montre qu'il y a encore des créatifs pour oser sortir des sentiers battus et rebattus dans tous les sens.