Achat lundi passé. 45h de jeu et moins d'une semaine plus tard, il est l'heure d'un rapide verdict.
La série des Assassin's Creed est à la fois fascinante et décevante. Le premier était impressionnant mais demeurait une simple ébauche. Le second, plus pragmatique, avait mis de côté certaines ambitions pour fournir une expérience de jeu léchée, en plus d'un scénario largement supérieur et d'une ambiance remarquable. Les deux spin-offs ont apporté un multijoueur que je n'ai jamais testé, ainsi que quelques petites idées plus ou moins bancales : rétrospectivement, je me suis pas mal emmerdé en y jouant. Enfin, Assassin's Creed 3 avait revu certains mécanismes de la série - pas toujours en bien, comme pour les combats - et avait enfin limité l'aspect manichéen dont souffrait tous les épisodes précédents. Mi-figue, mi-raisin. Que vaut finalement ce sixième épisode ?
Ambiance, histoire, PNJ
Il faut savoir que je suis un gros fan de piraterie et de liberté de mouvement dans les jeux vidéo. Du coup, ça partait plutôt bien, même si mes attentes étaient hautes.
Les pirates, tout le monde connaît. Mais rares sont les gens qui sont capables de citer plus de deux noms de pirates historiques et pratiquement personne ne peut expliquer ce qu'ils ont concrètement fait durant leur vie. Ubisoft a tapé au bon endroit : non seulement il y avait pas mal de choses à dire sur les pirates, mais en plus la "philosophie" opportuniste de ces brigands des mer collait finalement bien à celle des Assassins, telle que présentée dans la série. Le résultat in-game est du même acabit que les précédents.
Du côté des points négatifs, le jeu souffre d'une gestion de rythme et des ellipses temporelles passablement ratée, sans parler de quelques pans de l'histoire éclipsés pour des raisons étranges. Autre souci : à force de trop vouloir donner le premier rôle au joueur, Ubisoft a fait de ses PNJ des moules. Ils se contentent généralement de rester assis et de regarder. On nous dit que "Thatch" est redoutable, mais on ne le voit que se plaindre depuis la dunette du Jackdow et faire des remarques à la con. Pareil pour Vane et l'explosion de son navire au sortir de Nassau : ce moment aurait dû présenter le personnage comme un psychopathe intraitable alors qu'ici, il n'est qu'un suiveur.
Heureusement, la représentation globale des personnages et de la période est très réussie. Les PNJ sont certes mal mis en scène, mais ils restent très travaillés (à l'exception de ces pauvres Rackham et Davis) et les scénaristes ont trouvé des astuces sympas pour les intégrer à la méta-histoire. Mention spéciale pour Black Bart ! Qui plus est, le jeu nous plonge vraiment dans l'époque et on se prend assez rapidement à accompagner - tant bien que mal - notre équipage lorsqu'il entonne la chansonnette. Bref, sans surprise, le boulot a bien été rempli de ce côté-ci.
Gameplay
Le gameplay à terre est identique à celui d'Assassin's Creed 3 : une infiltration enfin utilisable (en dépit de l'IA des gardes complètement à la ramasse), des combats brouillons et du free-running qui manque de précision. En temps normal, c'est plaisant. Lorsque le jeu demande un peu plus de maîtrise, ça devient très vite frustrant. La série nécessite vraiment une remise en question en profondeur (du genre, plus profonde que celle menée pour le troisième épisode), mais... pour l'heure, il me semble que ça passe encore. À chacun(e) de se faire un avis là-dessus.
Si le gameplay au sol n'a rien de surprenant, la gestion du navire est la grosse nouveauté de cet opus. Sur le papier, ça me semblait un peu trop simple : les vents sont encore moins capricieux que dans le troisième épisode, et le jeu n'offre pas la possibilité de choisir le type de boulets avec lequel on veut envoyer une bordée. Tout est imposé. En chasse, c'est les boulets ramés. En fuite, les tonneaux explosifs. En bordée, les boulets standards / boulets explosifs. Les mortiers, sur la Dunette, peuvent tirer partout. Du côté de la manœuvrabilité, les Deux-Ponts vont souvent plus vite que les Bricks et les Goélettes : ça pose un vrai problème de crédibilité. Reste que cette construction simpliste a des effets positifs, une fois en jeu : ralentir les navires ennemis force le joueur à les prendre en chasse, et il est souvent nécessaire de bien se positionner pour maximiser l'impact des tirs. Le système nous épargne certaines prises de tête qui, au nom du réalisme, auraient sans doute plombé l'envie des joueurs d'arpenter les mers. Qui plus est, les quelques subtilités du gameplay doivent être exploitées complètement pour qui voudrait envoyer par le fond les quatre navires légendaires du jeu (ils représentent un challenge assez inhabituel pour un Assassin's Creed).
Dernière chose, la cohabitation du gameplay traditionnel de la série et de la gestion d'un navire offre une plus-value assez surprenante : ce sentiment grisant de pouvoir tout explorer à sa guise, de la manière qui nous convient. Pouvoir s'arrêter partout en mer pour crapahuter au sommet du grand mât, sauter à l'eau à tout moment, débarquer là où ça nous arrange, aborder en solo les navires ennemis qui mouillent à proximité des ports pour les éperonner, une fois de retour à bord du Jackdaw, sans résistance. Les outils ne manquent pas et les joueurs ingénieux ne se lasseront pas d'exploiter de nouvelles manières d'arriver à leurs fins.
En fin de compte, je n'ai jamais autant accroché à un Assassin's Creed. C'est sans doute la période du jeu qui veut ça, ou le jeu bénéficie peut-être d'un équilibrage particulier qui le rend accrocheur et satisfaisant.