Là ou Origins avait le mérite de remettre les choses à plat et Odyssey de touiller une grosse soupe de mécaniques prises à droite à gauche pour aboutir sur un espèce de musou géant doublé d'un A-RPG assez convainquant, Valhalla tente de faire le coup de l'épisode de la maturité en prenant un parti pris finalement à mi-chemin entre les 2 opus précédents.
Au final, les qualités du titre se résument pourtant à ce que Ubisoft Montreal a toujours su faire, de belles maps avec un level design toujours travaillé, une bonne ambiance et une reconstitution sympathique. Les changements supposés de philosophie de l'open world, du loot et de la progression me semblent en revanche avoir été (un peu) extrapolés par le public et la presse. Les events sur la map qui remplacent les quêtes annexes d'Odyssey ressemblent finalement aux petites quêtes d'Origins, avec il est vrai moins de temps de déplacement et de camps à fouiller, mais beaucoup plus de bugs dissuasifs. Le loot reste présent et vite routinier avec pour seule vraie conséquence un craft qui empêche mécaniquement de changer souvent d'arme (excès inverse de celui d'Odyssey qui incitait à en changer trop souvent).
Le jeu pêche de plus par un problème de structure en arcs narratifs hérité d'Odyssey qui morcèle le jeu en permanence en petits récits dont les airs rappellent cruellement les précédents jeux et qui peinent à se renouveler dans leur cheminement. Il s'agit vite d'aller dans un endroit, de se faire introduire 3 ou 4 personnages, de deviner quel va être le twist et lequel d'entre eux va nous trahir (ce qui est extrêmement téléphoné souvent). D'autant que contrairement à Odyssey, cette dilution de la trame principale ne se traduit ni par un vrai sentiment de liberté (mais plutôt par des cases à cocher sur une map) ni par des choix et des conséquences très pertinents (la plupart sont de faux choix ou des choix accessoires à une situation sur laquelle on a aucun contrôle, le jeu est extrêmement frustrant). Et c'est là ou on voit qu'Ubi Montreal a cherché à aller à contre-emploi pour suivre le chemin tracé par le studio de Quebec, sans arriver à une maitrise réelle, ni à concilier ça avec l'absolu dégueulis de contenu du jeu.
Oui car cet AC est probablement encore plus long et lourd qu'Odyssey. Et le problème réside probablement là. Les principales surprises du jeu résident dans le fait de nous balancer une nouvelle map ou une nouvelle histoire à la gueule lorsqu'on pense que l'on a enfin tout vu. Alors oui ça fait certainement son effet quand, au détour de ce que tu penses être une quête annexe, tu te retrouves à
Asgard puis à Jotunheim, à te battre avec le loup Fenrir et le géant Suttungr
Et oui, ça fait son effet quand
Tu te retrouves sans équipement aux confins du monde dans les terres du Vinland, dans une séquence qui fait finalement penser à une ile Finalis de BoTW version Assassin's Creed
Tu te dis que les développeurs ne se sont pas fixés de limite, et tu te dis qu'avec le recul, on ne peut pas totalement jeter l'opprobre sur un jeu avec de vraies bonnes intentions.
Pour autant c'est quand le jeu est terminé et qu'on a le recul nécessaire pour s'interroger sur ce à quoi on a joué qu'on est obligé d'admettre que ce n'est pas brillant, et que surtout la justification du jeu par rapport aux 2 précédents est moins claire. Pour la 3ème fois on a un jeu qui n'arrête pas de jacasser pour pas grand chose, pour la 3ème fois on a comme principale thématique une soupe obscure de paganisme sans trop savoir ce que le jeu veut nous dire (peut être rien ?). Et pour la 3ème fois on a un gameplay pas assez mauvais pour être désagréable mais pas assez bon pour rehausser l'intérêt du jeu.
Le gameplay global justement, tente une approche plus consistante que le très (trop ?) accessible Odyssey. Que ce soit par la fin des sauts de 100 mètres sans prendre de dégats, l'ajout d'une barre d'endurance ou les talents actifs qui ne font plus partie de l'arbre de compétence (un peu mieux branlé que dans les précédents) mais que l'on doit trouver nous même dans l'open world. Dans les faits le jeu n'échappe pas à la vacuité et au manque de profondeur, en s'avérant même un peu plus frustrant qu'Odyssey. Par la rigidité du bateau et la suppression de plein de mécaniques navales d'Odyssey (expliqué par le contexte historique), la réinstauration de certaines vieilles mécaniques d'infiltration des premiers AC dans les villes de Valhalla qui s'avèrent totalement inutiles malgré l'état d'alerte et rendent juste la progression un peu plus chiante, ou encore la fin du scaling d'Odyssey pour des zones levelées : Valhalla est clair, il veut vous mettre des limites, des règles un peu plus tangibles dans son open world, ne croyez pas que vous pouvez jouer en pilote automatique ! Non je déconne, en fait ça ne change rien.
A ça s'ajoute le personnage d'Eivor, extrêmement ambivalent, ou extrêmement mal développé au choix. Qui commence comme un personnage classique d'Assassin's Creed (obnubilé par la vengeance) mais finit comme un...ben on sait pas trop. Pas comme un assassin, pas comme un pacifiste, pas vraiment comme un viking non plus. Le jeu nous fait piller des monastères, attaquer des chrétiens pendant la messe sans que cela ne pose aucun problème, par contre se joue une espèce de conflit intérieur avec l'esprit d'Odin pendant tout le jeu, qui se termine quand
lors d'un combat ultime contre ce dernier, le jeu nous demande d'abandonner le combat en déséquipant sa fidèle hache dans l'inventaire
Ou le jeu veut en venir ? Aucune idée. On dirait que le scénario a été écrit par 50 personnes chacune dans leur coin qui ont à la fin réunis leurs idées ensemble. Ca n'a ni queue ni tête, et je ne parle même pas des révélations finales et de la fin du présent complètement WTF et kikoolol à 1000% (au passage pour ceux qui se demandent, il s'agit encore d'un AC ou il y a plus d'isu dans le jeu que d'assassins et de templiers).
En résumé, là ou Valhalla voulait représenter le meilleur de la nouvelle formule, il a, sans vraiment réussir à être mauvais, confirmé que l'heure était venue de passer à autre chose. Soit au niveau de l'open world, soit au niveau du style de jeu, ou au moins du moteur qui n'est plus du tout accordé à des jeux de 70 heures de dialogue (ces PNJ nom d'un chien, mais que c'est moche en gros plan).