Je veux bien reconnaître trois qualités à Avowed :
- une direction artistique séduisante... même si elle ne va pas au bout de l'idée du dreamscourge, plus présent dans les visuels du jeu que dans le jeu lui-même, sauf vers la fin. Et trop peu soutenue par l'ambiance. Je suis fan de Jeff VanderMeer (surtout le cycle d'Ambergris) et j'anticipais quelque chose du new weird mais que dalle ou presque. Je remarque que, techniquement, je trouve le résultat correct alors que je joue sur un PC très modestement équipé (enfin excepté le problème récurrent des shaders de l'Unreal Engine).
- la ligne directrice du scénario - à mon avis loin d'être exploitée à son plein potentiel - mais intéressante et plutôt efficace. Même si la fin passe un peu au forceps pour limiter les options proposées au strict minimum (et que la zone finale sent la fin de ligne budgétaire et la nécessité d'en finir).
- le level design assez vertical, même s'il est trop visiblement balisé et que si on cherche à grimper en dehors des clous on découvre murs invisibles et impasses (voir chutes dans le décor à de rares endroits) et qu'il n'y aura de toute manière rien à découvrir.
Pour le reste le jeu oscille entre médiocre et mauvais :
- les systèmes en place évoquent l'immersive sim mais tous sont inaboutis ou incomplets, au point de ne servir à rien et d'accoucher d'un jeu d'action à la première personne sans finesse et répétitif.
- l'exploration est d'une rare absurdité : affreusement encadrée (jusqu'à l'icône pour indiquer le type de dégâts pour ouvrir chaque passage) et qui débouche toujours sur un coffre (avec une aura lumineuse pour indiquer la qualité du loot !) qui, la plupart du temps, n'a rien à faire là et n'offre de toute manière rien de bien intéressant : généralement des ressources pour le système de craft qui sous-tend artificiellement la montée en difficulté*. Enfin je dis coffre mais, pour être exact, ça peut-être une autre forme de container (sac à dos ou cadavre). De même on ne trouvera pas de bassin / lac sans son trésor enfoui.
*En effet les dégâts infligés aux ennemis dépendent à la fois de leur niveau (affiché et qui obéit au même format que l'équipement) et de celui de l'équipement (ce qui rend l'upgrade obligatoire plus ou moins rapidement selon son habileté en combat et le paramètrage de la difficulté). Comme par hasard chaque nouvelle zone de jeu offrira un équipement de base d'un cran plus élevé que la précédente et débloquera les ressources permettant le craft du cran supérieur.
- l'univers est statique jusqu'à annihiler toute idée de suspension de l'incrédulité : c'est bien simple les PNJs ne réagissent à rien ! On commence à pressentir que l'aspect jeu de rôle est proche du néant. Les quêtes sont basiques et offrent de rares choix (souvent notre lattitude se résume à dire la même chose sur un ton différent), généralement pertinents malgré de grosses omissions. Finalement c'est dans nos rapports intérieurs ou oniriques - sans conséquences dans le déroulement de l'aventure - qu'on aura le rare loisir d'incarner notre personnage. D'ailleurs l'écriture est assez plate malgré quelques fulgurances.
- le jeu décline sa structure avec un systématisme qui frise le ridicule (dont les coffres déjà évoqués) : à chaque cadavre - là j'exagère pas mal mais c'est l'esprit - son log pour expliquer ce qu'il fait là (je n'en peux plus de cette facilité narrative souvent absurde et chaque fois je pense aux Caves of Caerbannog des Monty Python), à chaque grande zone sa ville centrale (ou ce qui en tient lieu), un totem en 6 morceaux, 5 contrats de chasseur de prime, 3 cartes au trésor, 1 strangled adra, 1 ancien memory, le/la cartographe perdu de Sanza and so on.
Le game design est sans inspiration : on retrouve toutes les recettes modernes et éculées du jeu vidéo. Les logs comme principal moyen de narration environnementale, la contamination du hack & slash dans le système (caractéristiques et arbres de compétences), du MMORPG avec les ressources et l'artisanat, le monde ouvert avec ses 'collectibles' disséminés tous les 100 mètres. Sans surprise on en arrive à un jeu médiocre dans son essence même et trop long pour son propre bien. Il n'est pas vraiment raté, parfois même sympathique : il est probablement conforme au peu d'ambition ludique. Et si ambitions rôlistiques il y avait elles se sont noyées dans l'action en dehors de l'intention initiale de fulgurances ponctuelles.
On sent que le jeu se voulait un Elder Scrolls, aurait pu devenir un Dark Messiah of Might & Magic, mais se trouve réduit à un jeu d'action / aventure basique avec une boucle de gameplay répétitive (combat / coffre / crapahutage) jusqu'à la nausée... mais dans un univers plutôt chouette. De là à vouloir y passer 40+ heures ? Sur le principe la proposition pourrait être concluante mais à condition de proposer - a minima - des combats plus passionnants, un contenu moins générique et une narration plus soignée. Quitte à être sensiblement plus court d'ailleurs.