Baldur's Gate III
9.1
Baldur's Gate III

Jeu de Larian Studios (2023PC)

Un grand RPG ! Mais est-il fait pour vous ?

N’y allons pas par quatre chemins, tout suspens serait inutile. Vous le savez sans aucun doute, Baldur’s Gate 3 est un très bon jeu. Un jeu excellent, même ! Il serait donc plutôt inutile que je me lance dans la liste de ses qualités, tant d’autres critiques, qu’elles soient pro ou amatrices, s’en sont déjà occupées. Au lieu de cela, je vais plutôt pointer les éléments qui peuvent gêner certains joueurs et qui feront un BG3 une déception pour certains. Car c’est ainsi, rien ne peut jamais plaire à tout le monde, et la proposition de Larian Studio n’est pas ouverte à tous les publics.

Mais il me faut tout de même mentionner ce qui fait de BG3 un très grand jeu, sans quoi ma seconde partie n’aura pas de sens.

Baldur’s Gate 3 est un grand RPG : ses qualités sont légions

BG3 est un pur RPG, un CRPG, basé sur l’univers et les règles du JDR papier Donjons & Dragons. Un univers riche, dans lequel ils ont pioché beaucoup de choses, créant un lore particulièrement touffu dans lequel il serait facile de se perdre. L’histoire est intéressante en soi, mais ce sont surtout les histoires qui sont particulièrement réussies. Chacun de vos compagnons vous rejoint avec son passé, qui deviendra une quête passionnante à chaque fois. Chaque lieu visité a une histoire à raconter. Même les pauvres pnj, qui se cantonnent généralement à une phrase toute faite inutile, ont ici plus de profondeur. Cette richesse est dans la lignée des précédents Baldur’s Gate, mais elle est ici poussée à l’extrême. Et votre rôle dans tout cela, sera de prendre parti. Et c’est là que le titre fait preuve d’une originalité rarement vue. Oubliez toutes les décisions manichéennes habituelles, les choix entre gentil ou méchant et les faux choix si souvent croisés dans le jeu vidéo. Ici, vous aurez de véritables choix, où de nombreuses nuances vous sont proposées, mais aussi des décisions difficiles à prendre, parfois entre la peste et le choléra. Et ce qui est admirable, c’est que l’univers et les pnj réagissent toujours en fonction de vos choix (avec des doublages toujours parfaits !).

La richesse de l’univers (aidée par la beauté des graphismes et la direction artistiques particulièrement réussie) est accompagnée par toute une panoplie de quêtes, principales et secondaires, qui foisonnent dans tous les lieux que vous visiterez. C’est bien simple, il y en a partout ! Parfois elles s’entrecroisent sans que vous ne l’eussiez imaginé, ajoutant encore plus de profondeur à l’univers et aux personnages qui le composent. Elles sont toutes scénarisées, toutes intéressantes. Là aussi, c’est encore bien trop rare dans le jeu vidéo.

Enfin — et je finirai là l’énumération des qualités que je m’étais promis de résumer en quelques lignes seulement — la richesse de cet univers et de ces personnages s’accompagnent également d’une extrême richesse dans le gameplay. En fait, c’est une richesse jamais vue avant, je pense. Tout est possible, c’en est étourdissant ! Chaque situation peut se résoudre de nombreuses manières, mais ces possibilités ne sont pas pointées par une grosse flèche rouge, non. Il va vous falloir réfléchir, faire le tour, observer, imaginer en quoi vos sorts et vos potions peuvent vous aider, etc. Et lorsque vous verrez tout ce que le jeu peut vous offrir de choix, vous comprendrez à quel point chaque partie peut être différente en fonction de la manière dont va procéder chaque joueur.

Mais parmi toutes ces qualités, aussi admirables soient-elles, certaines forment aussi les défauts du titre. Et pour qu’un jeu ait ses qualités pour seuls défauts, c’est que nous sommes franchement face à un monstre du genre. En fait, les défauts de BG3 se divisent en deux catégories : ceux inhérents au genre du CRPG, et ceux induits par ses qualités.

Les défauts liés au CRPG

Larian a tout fait pour que son jeu soit le plus immersif possible. C’est magnifique, les monde est vivant et réagit à vos actions, la musique est somptueuse, etc. Mais les CRPG sont des jeux de rôle qui mettent l’accent sur les compétences, les objets et les jets de dés. Pas sur l’immersion. La vue isométrique, d’ailleurs, n’aide pas. Contrairement à un Elder Scrolls ou un WItcher, vous allez passer plus de temps à réfléchir à la création et aux compétences de vos personnages et à leur équipement qu’à admirer les alentours. De même, l’exploration se cantonne souvent à maintenir la touche alt pour trouver tout objet utile, avant même de regarder de que le paysage a à nous offrir comme vue. Pourtant, Larian a tout fait pour immerger efficacement le joueur, et c’est réussi dans une certaine mesure. Mais ce sera toujours inférieur à un RPG en vue à la 1è ou 3è personne où les objets ramassables ne sont pas en surbrillance.


Dans Baldur' Gate 3, on est plus occupé à calculer, analyser, réfléchir, qu'à vivre l'aventure. C'est en cela que, pour moi, l'immersion est inférieure à d'autres RPG.


Le calcul, la tactique et la recherche d’efficacité prennent donc le pas sur l’immersion. C’est la loi du genre. Et cela se vérifie d’autant plus dans les combats. Ceux-ci sont éminemment stratégiques, ce qui vous empêche de vous laisser aller à foncer dans le tas en lançant des boules de feu de la main gauche pendant que vous frapper à la hache de la main droite. Et même sans aller vers ses extrémités, les combats de Witcher 3 étaient bien plus immersifs parce qu’en temps réels. Il était inutile de prendre autant de paramètres en compte à chaque action. Le tour par tour, les déplacements limités, les sorts limités, les chances de toucher en fonction des jets de dés, tout cela vous oblige à faire preuve de plus de tactique et de calcul qu’avec tout autre type de jeu (si ce n’est les RPG tactiques bien sûr).

Et pour insister sur les combats, il faut bien garder à l’esprit que ce type de gameplay n’est pas au goût de tout le monde. Trop de contrainte, trop de tactique, ou tout simplement trop de combats (il y en a beaucoup), peuvent mettre sur la paille bon nombre de joueurs qui veulent quelque chose de plus immédiat et de plus immersif.

Tout cela est donc très riche, mais l’immersion sera toujours plus faible qu’un Skyrim par exemple. Les calculs en tous genres et la tactique prennent le pas sur le plaisir immédiat, l’émerveillement et l’immersion. C’est le genre qui veut ça. Alors oui c’est passionnant pour ces mêmes raisons, mais l’expérience sera différente d’un RPG en temps réel en vue à la 1è ou 3è personne.

les défauts liés à ses qualités

Comment les qualités d’un jeu peuvent être en même temps ses défauts ? BG3 répond parfaitement à cette question.

La richesse du jeu est incroyable, et c’est vraiment génial de pouvoir se lancer dans une telle aventure. Mais Larian n’en aurait-il pas trop fait ? Intégré trop de choses dans leur jeu ? Il vous arrivera souvent de vouloir faire une quête, puis de tomber sans le vouloir sur un souterrain dans lequel vous devrez combattre, parfois pendant 30, 40 minutes, désamorcer des pièges, reprendre votre partie parce que tout le monde est mort, discuter avec des personnages qui ne sont pas du tout liés à votre quête, pour vous rendre compte que 2 ou 3h sont passées et que vous n’avez même pas fini la seule quête que vous vouliez faire ce soir-là. Et c’est très souvent comme ça. Les quêtes s’entrecroisent, je le disais dans ma première partie, mais parfois on aurait juste envie de tranquillement finir ce qu’on s’était fixé, ce qui est souvent compliqué. Tout prend du temps, dans BG3. C’est la même chose pour tout ce que vous voudrez faire. Vendre des objets au marchand, changer de compagnons, vous déplacer d’un point A à un point B, tout prendra toujours bien plus de temps que vous le l’imaginiez au départ. Parce que Larian a souhaité mettre l’accent sur l’immersion et le côté RP, vous ne pourrez pas faire ces simples actions en deux clics. De même, les combats, aussi tactiques et intéressants soient-ils, prennent énormément de temps. Et il y en a beaucoup ! Surtout qu’il est fréquent de recharger sa partie pour recommencer.

Tout cela induit un temps de jeu à rallonge qui pourra en agacer ou en frustrer plus d’un (je suis personnellement à la limite…). Tout est long. Mais si, dans Kingdom Come Deliverance par exemple, tout prend aussi du temps, vous savez que c’est pour faire une seule quête. Ici, c’est parce que vous êtes constamment coupés dans ce que vous voulez faire, par d’autres quêtes, dialogues, rencontres, etc, ou bien parce qu’un combat difficile vous a pris plus d’une heure. Et vous vous étonnerez fréquemment du peu de chose que vous avez fait, ou finalisé, en 3 heures de jeu.

Alors oui, j’ai été absorbé par BG3 comme rarement. Mais ce ne sera pas le cas de tout le monde. C’est définitivement un jeu de niche qui a agrandi son terrier, pour englober plus de joueurs. Mais il n’en reste pas moins une grosse niche dans laquelle tout le monde ne peut pas rentrer. Y compris des joueurs de RPG. Vous pouvez adorer les Elder Scrolls et les Witcher, mais ne pas aimer BG3, car c’est une tout autre proposition.

Baldur’s Gate 3 est un jeu exceptionnel, je ne suis pas le seul à le dire. Sa richesse, ses personnages, ses quêtes, sa beauté, ses possibilités presque infinies, en font un jeu qui mérite amplement de rester dans les annales. Je suis plongé dedans la tête la première et j’y ai passé plus de 100h comme ça ne m’était plus arrivé depuis bien longtemps. Mais il me semble important de préciser également que BG3 reste un jeu de niche et que sa richesse et ses mécaniques complexes peuvent en refroidir plus d’un. Ici, le calcul, la tactique, les compétences et les combats prennent le dessus sur l’immersion et l’accessibilité. Tout joueur de RPG n’y sera pas forcément sensible. Mais si vous pensez qu’il peut vous plaire, alors vous y passerez un excellent moment.

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le 3 sept. 2023

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roifingolfin

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