BioShock Infinite par Traz
Tout commence comme dans un Disney Steampunk... et pourtant.
Le défi était de taille : rendre à Bioshock ses lettres de noblesse. Les dév' du jeu avaient pour mission de redonner aux joueurs ce qui avait fait l'énorme succès du numéro 1 de la série : un univers prenant, peaufiné à l'excès, une direction artistique originale, et, plus important encore, un scénario qui tenait la route.
L'énorme twist de Bioshock premier du nom avait mindfucked le joueur, en même temps que le personnage principal, et s'était imposé comme un des meilleurs retournements de situation du jeu vidéo tant il prenait au dépourvu.
Inutile de dire que Ken Levin était attendu au tournant pour cette suite, et que le scénario comme l'univers avaient tout intérêt à être à la hauteur des espérances des joueurs. Ce qui a été le cas.
Bioshock Infinite commence donc comme un Bioshock. Booker DeWitt (nous donc) est largué au milieu d'un environnement qu'il ne connait pas, et ne comprend pas. Mais qui a de sérieuses allures de monde parfait. Le ciel est bleu, les oiseaux chantent, et nous incarnons le chevalier blanc envoyé ici pour retrouver la princesse, Elizabeth.
Ce Disney revisité à la mode steampunk enchante d'abord le joueur. Comme l'avaient laissé supposer toutes les previews et bandes-annonces du jeu, la cité volante Columbia est tout simplement magnifique.
On passe de longues minutes à découvrir les lieux, à explorer autant que faire se peut (c'est-à-dire pas beaucoup, l'univers étant malgré tout linéaire), et surtout à écouter les conversations, quand l'occasion se présente entre deux séances de shoot, pour s'imprégner de ce nouveau monde. Adieu l'ambiance claustro de Rapture, bonjour les grands espaces vertigineux de Columbia.
Evidemment, pas de bon Disney sans grand méchant, et l'image parfaite de la cité des cieux a tôt fait de se craqueler pour laisser entrapercevoir le monstre dissimulé sous ce vernis de bonne humeur et de politesse obséquieuse. Je n'en dirai pas plus sur le sujet, tant le plaisir de jeu repose en partie sur cette découverte.
Il nous faudra malgré tout une bonne heure de jeu (ou moins, je suis lent) pour découvrir notre princesse. Elizabeth a en effet tout de la princesse Disney (ou Pixar) : candide, innocente, joyeuse, drôle... Elle évoque une héroïne de dessin animée jusque dans ses mimiques, soulignées par de grands yeux bleu tours à tours interrogateurs, rieurs voire grondeurs. Impossible de ne pas s'attacher à ce personnage.
Heureusement, la comparaison s'arrête là : les thématiques abordées sont plus matures, plus profondes, et l'ambiance Disney des premières heures a tôt fait de disparaître au profit d'un scénario plus noir, où affleurent quelques grandes problématiques des années 1910. Surtout, le traditionnel "chevalier servant délivrant la princesse" s'avère être un trompe l’œil. Elizabeth n'est pas une greluche passive, les développeurs du jeu s'étant plu à créer un personnage qui ne se laisse pas faire. La jeune fille court régulièrement devant nous, nous échappe, s'arrête pour observer un étal, commente nos actions, nous aide en combat... Autant de comportements qui changent agréablement des personnages non joueurs nous suivant bêtement.
Impossible, pourtant, de faire d'Elizabeth l'unique raison de la réussite de ce Bioshock Infinite. Tout y est travaillé : la direction artistique est une nouvelle fois sublime (il est impossible de ne pas s'arrêter pour contempler quelques scènes ou paysages du jeu) et le scénario ne vous épargnera pas un superbe twist (que les plus attentifs, avertis cette fois, auront cependant en partie vu venir). La narration du jeu est encore une fois parfaitement maîtrisé, depuis la révélation des dessous de Columbia, au secours d'Elizabeth, jusqu'à la scène finale, qui vous invitera à aller consulter les forums appropriés pour être certain que, oui, vous avez bien tout compris. Pour ne rien gâcher, l'ensemble du jeu est accompagné d'une superbe bande-originale.
Même le gameplay, pourtant pas si différent des premiers Bioshock, a été suffisamment réajusté pour être un peu plus nerveux, notamment avec l'apparition de rails aériens. Ces "skylines" proposent malheureusement peu de possibilités si ce n'est d'offrir au joueur la capacité de se déplacer extrêmement rapidement, alors qu'elles auraient pu déboucher sur des choix de gameplay littéralement vertigineux. Les indispensables plasmides, signature de la série, ont quant à elles laissé la place aux toniques, similaires en tous points à leurs prédécesseurs. Ils permettent, comme avant, un style de jeu assez varié.
Bioshock infinite s'offre le luxe d'un quasi sans faute, son principal défaut étant finalement d'être un fps (je vous ai dit que ce n'était pas mon truc ?), là où l'univers a largement de quoi accueillir un superbe RPG.