Sous ses allures de livre fantastique classique - il est en réalité inclassable - ce roman questionne, l'air de ne pas y toucher au vu de son quatrième de couv', sur le sens que l'on est prêt à accorder à la vie.
Portée par une écriture déliée (assonances et allitérations sont légions), travaillée à la virgule près et soulignée de néologismes, l'atmosphère de cette oeuvre est absolument unique. Ce sont les héros, tissés et entrelacés au cœur de la Horde, qui révèlent la véritable intention du livre, grâce à une polyphonie narrative savamment maîtrisée (ne perdez pas le marque-page !).
L'oeuvre se décompose en deux éléments essentiels : d'abord, l'univers, un monde original, crédible, conçu autour d'un unique élément, origine de la vie : le vent. Un monde qui a surtout le mérite de changer des habituels poncifs de la fantasy (ou est-ce de la SF ?).
L'autre élément principal, comme le titre de l'ouvrage l'indique, n'est autre que la Horde elle-même, multitude de 23 caractères, profonds ou frisant la caricature, composant à eux tous un personnage à part entière. On se prend à aimer, vraiment, ces (anti-)héros, à mesure qu'on les accompagne, quand bien même ils sont imparfaits. 24eme hordier de cette improbable amas de personnalité, nous controns avec eux, "en vers et contre tous", nous inspirant de la hargne de Golgoth, des mots ciselés de folie de Caracole, de la foi de Sov ou encore de la droiture du Prince (égal à lui-même, jusque dans le Chrone).
A travers cette quête improbable (trouver l'origine du vent), Damasio offre surtout au lecteur une aventure immensément humaine, où le parcours aux côtés de la Horde transcende, de loin, l'objectif ultime de l'épopée.
Pour ne rien gâcher, Alain Damasio a eu la très bonne idée de joindre à son oeuvre une bande originale. Je ne l'ai pas écoutée pendant ma lecture mais l'ai découverte après. Certains morceaux (mention spéciale à "Norska" et son "Respirez !") ont eu pour effet de me replonger au cœur du récit... voire de me faire reprendre le livre sur mon étagère.
"La Horde du Contrevent" est la preuve qu'il existe de la très très bonne littérature fantasy/fantastique (ou autre) française. Si le livre est un peu difficile au commencement, il vaut largement la peine de se lancer tant il parvient à faire rêver. Rarement un bouquin m'aura laissé aussi pensif, aussi triste aussi d'abandonner les personnages, une fois le "conte à rebours" terminé.
La bonne nouvelle c'est qu'Alain Damasio avait initialement prévu d'en faire un triptyque.