Il y a deux éléments communs aux grands contes de fées :
-l'instantanéité de leur émotion parvenant à canaliser des émotions humaines pures, immédiatement identifiables par le récepteur du récit. A l'image du gameplay de ce Brothers qui malgré l'absence d'indication à l'écran produit une réaction instinctive et naturelle chez le joueur en faisant appel à sa propre humanité davantage qu'à son esprit logique, et produisant ainsi une immersion immédiate.
-l'universalité de leur propos ou comment à travers un univers fictif, ce récit va faire ressentir une variété de sentiments englobant toutes les facettes de l'existence : un attendrissement enfantin, un émerveillement onirique, une peur primaire devant le danger, l'inconnu et la propre vulnérabilité des faibles humains face à l'immensité du monde ainsi qu'une tristesse sincère face au deuil et la séparation, ces multiples émotions formant un périple initiatique où le héros trouvera la force de s'endurcir pour le surmonter. Brothers exploite cette universalité avec une telle sincérité qu'elle en confère au génie, plaçant instinctivement le joueur dans la meilleure position pour lui faire éprouver émotionnellement ce conte de fées, exploitant l’interactivité du jeu vidéo avec une ingéniosité admirable.
Beaucoup de jeux ont déjà été qualifiés de contes de fées interactifs mais l'expérience humaine de Brothers donne le sentiment que ce jeu est le seul à mériter cette appellation. Une œuvre remarquable dont la réussite tient autant de la compréhension totale des mécanismes du conte de fées que dans un savoir faire absolu en matière d’interactivité, démontrant encore avec brio que le jeu vidéo est décidément le média sublimant les récits lorsque ses caractéristiques sont intelligemment exploitées.